Suite du séjour à El Chaltén : entre lassitude et émerveillement
Du 8 au 12 mars
Journées des 8 et 9 : lassitude
Nous restons deux jours à El Chaltén sans rien faire car il pleut. Moins que prévu mais tout de même trop pour partir en excursion en montagne.
Nous passons l’essentiel du premier jour dans un café, censé avoir une meilleure connexion Wi-Fi que le camping. En réalité, il n’y a qu’une parabole qui fournit internet à toute la ville, du coup quand cela ne fonctionne pas, cela ne fonctionne nulle part. En milieu d’après-midi, Christian et Romina, le couple d’amis suisses, débarquent dans le café avec une carte topographique de la région : ils sont passés au bureau des rangers et sont motivés pour faire une randonnée de 3 jours dès que la météo s’améliore, c’est-à-dire le sur-lendemain vendredi.
Le lendemain jeudi se divise entre courses et recherche de baudriers pour le vendredi : en effet, pour obtenir le permis de faire la randonnée du Paso del Viento, il faut un minimum d’équipement car une des traversée de rivière se fait sur tyrolienne. Mais trouver des baudriers n’est pas une mince affaire : les loueurs ne prennent pas de réservation donc il faut juste espérer qu’il en reste assez le jour où on les veut vraiment ! Nous voulons nous enregistrer à l’entrée du parc national pour nos trois jours de randonnée à venir, mais ce n’est pas possible sans montrer le baudrier. Le bureau des rangers ferme à 17h mais pour ne pas payer la journée en cours, il faut louer l’équipement après 19h… Un casse-tête un peu agaçant car on ne peut rien anticiper. Après une première boutique en rupture de stock, nous en trouvons une deuxième où on nous loue l’équipement pour 140 pesos (environ 8€) par jour et par personne, pas donné !
10 mars : en route pour trois jours dans la nature dans le parc national Los Glaciares
Ce matin, pas besoin de plier la tente, c’est le bon côté du dortoir !
Anne-Laure, Guillaume, Romina, Christian, Thomas et moi partons avec nos sacs vers 9h. Oli fait finalement le trajet avec Eric, un allemand bricoleur : il a fabriqué son sac à dos, ses bâtons de marche et sa tente !
Première étape, aller s’inscrire à l’entrée du parc. Évidemment, personne ne regarde si l’on a bien nos baudriers ! Ce n’était pas la peine de dire deux jours avant que l’inscription était impossible sans…
Deuxième étape : les 16 km qui nous séparent du camping Toro, près du lac du même nom. Il pleut, les nuages sont hyper bas du coup on ne voit pas du tout les paysages alentours mais nous avançons vaillamment. Nous croisons quelques vaches sauvages mais c’est tout. Le terrain est imbibé d’eau et de bouses du coup nos pieds sont assez rapidement mouillés. Sur ce point, Thomas et moi sommes déçus par nos chaussures Salomon en gore-tex achetées pour le tour du monde. Outre ces champs d’eau, nous devons également traverser tant bien que mal des rivières, en marchant soit sur des branchages positionnés en équilibre, soit sur des cailloux à fleur d’eau. Un vrai numéro d’acrobate. Heureusement, Christian et Eric ont des bâtons de marche, bien utiles pour certains passages.
La pause déjeuner est très rapide car le vent gelé se lève et la vue sur la vallée relativement bouchée. On aperçoit malgré tout un bout du glacier au loin.
Avec tout cela, nous arrivons vers 16h au camping, un peu congelés. Les tentes à peine montées, nous allons chercher de l’eau à la source et en mettons à chauffer pour la tisane, puis le chocolat chaud, puis la soupe, puis les pâtes, puis la tisane. Vous l’aurez compris, nous avons passer le reste de la journée à boire de l’eau chaude avant de nous réfugier dans nos tentes à 20h30.
11 mars : une journée extraordinaire
Soleil ! Pas un nuage ! Lorsque Thomas et moi sortons de la tente, nos compagnons de fortune ont déjà installés table et tabourets, trouvés la veille dans une remise, en plein soleil. Le cadre est beau : les montagnes sont dégagées et quelques unes sont saupoudrées de neige.
Nous partons tranquillement vers 10h en laissant les tentes sur place car nous faisons un aller-retour vers El Paso del Viento, soit 16 km au total.
Après 1h de marche, nous parvenons à la fameuse tyrolienne. Sans elle, il faudrait traverser le torrent glacé et tumultueux avec de l’eau jusqu’au hanche… Nous passons donc chacun à notre tour sur l’autre rive, à la force de nos bras car le point d’attache est plus haut à l’arrivée.
Vient ensuite une heure et demi de marche sur un terrain relativement facile, parsemé de rochers. Nous atteignons la moraine : soit nous continuons dessus, soit nous passons par le glacier. Avisant des cairns, nous choisissons l’option 1 : la moraine. L’avancée est très fastidieuse, les pierres se dérobent sous nos pieds et nous restons bien à la queue-leu-leu en gardant nos distances. Oli et Eric ont, eux, fait le choix du glacier et ils avancent beaucoup plus vite. Cette traversée de moraine nous prend au moins une heure !
Et ce n’est pas fini, après ça grimpe sec jusqu’à la passe, bien nommée car cela souffle. Nous pique-niquons avec vue sur deux glaciers avant d’atteindre le passage tant attendu.
Après un total de 4h30 de randonnée nous voilà devant la troisième plus grande calotte glacière au monde après l’Antarctique et le Groenland : le Champ de Glace Sud Patagonien ! Waou ! C’est absolument magnifique, nos yeux pétillent et nous avons une chance incroyable d’être là, au soleil, devant un tel espace. Quel spectacle époustouflant !
Le vent frais forcit et nous devons attaquer les 8 km de descente au campement. Il est temps de dire au revoir à Oli et Eric qui prennent un autre itinéraire. Thomas et moi prévoyons de revoir Oli à El Calafate deux jours plus tard.
Les photos de groupe prises, nous descendons, et ce beaucoup plus rapidement, notamment car nous passons par le glacier plutôt que la moraine, beaucoup plus plat. Nous atteignons le camping en 3h. Le vent est très fort maintenant, probablement autour de 70 km/h mais au moins il n’y a plus d’humidité.
Nous dégustons soupe et pâtes à la sauce tomate avant d’aller bouquiner au lit en écoutant le vent s’intensifier. Heureusement que la tente est entourée d’une palissade !
12 mars : retour sous la grisaille
Le vent souffle toujours et les nuages sont là. Nous démontons la tente et empaquetons les affaires pour rentrer sur El Chaltén, à 16 km de là.
C’est le même trajet qu’il y a deux jours mais les rivières ont un peu grossies : les acrobaties recommencent !
Thomas et moi décidons de marcher au pas de courses pour manger en ville : j’ai envie de manger un burger avant de quitter la ville. Nous faisons donc ces 16 km en 4h30. Le temps se dégrade et les pantalons de pluie sont bien utiles ! Malheureusement, lorsque nous arrivons devant le restaurant, nous constatons qu’il est rempli, il ne reste que des places en terrasse bizarrement. Tant pis, nous allons au camping prendre une douche chaude et récupérer nos affaires laissées sur place. A 15h, nous retournons au restaurant : c’est bon, il est vide, à table !
A 16h nous rendons les baudriers et faisons des courses rapides puis rejoignons la troupe dans la salle commune du camping pour un dernier thé. Nos chemins se séparent ici, après deux semaines de vie commune. Romina et Christian descendent plus lentement que nous vers Ushuaia. Par contre, nous devrions revoir Anne-Laure et Guillaume le lendemain à El Calafate.
18h : le bus nous emmène vers El Calafate. Nous y arrivons à 20h50 et réservons immédiatement les billets de bus pour Puerto Natales où nous nous rendrons le sur-lendemain, mardi 14.
Nous dînons à l’auberge I Keu Ken, propre et bien chauffée, avec du thé en libre service, chouette. Notre chambre ne comprend que 4 lits et personne ne ronfle : nous dormons à poings fermés la tête remplie d’images de glaciers et les pieds bien au chaud.
Note : une partie des photos de cette article ont été prises par Oliver, qui outre son emploi de prof d’anglais globe-trotteur est également photographe. Vous pouvez retrouver ses œuvres sur sa page Behance.