Six mois et deux jours après notre départ de Paris, nous attendons une fois de plus un avion, l’avant-dernier de notre virée autour du monde qui nous mènera de Lima à Londres.
Les sentiments sont partagés entre la joie de revoir notre famille et nos amis, l’envie de retrouver la gastronomie française, la curiosité de découvrir ce qui a pu changer en six mois en France mais aussi un petit pincement au cœur de se dire que c’est une page qui se tourne.
La fin d’un long voyage mais le début d’un nouveau chapitre de notre histoire !
Le trek du Salkantay, en route vers le Machu Picchu !
Le réveil sonne à cinq heure du matin, il fait encore nuit et froid à Cusco, à 3200 mètres d’altitude en cette fin d’automne. Après un petit-déjeuner rapidement avalé, nous voilà en route dans la ville endormie, notre équipement sur le dos, à la recherche du collectivo qui nous conduira jusqu’au point de départ du trek du Salkantay, quatre jours entre montagne et pré-jungle, avec pour objectif final le Machu Picchu.
Jour 1 : ça grimpe !
Après trente minutes de marche, nous arrivons sur les hauteurs de Cusco à une intersection d’où partent les taxis collectifs pour Mollepata, le village de départ du trek. Nous voyant avec nos sacs de rando, plusieurs chauffeurs nous alpaguent en nous proposant le même prix pour la course : 20 soles. Nous choisissons le premier de la file, déjà bien rempli, qui grâce à nous peut partir car nous occupons les deux derniers sièges (les minibus collectivos attendent généralement d’être pleins pour partir). Nous arrivons à Mollepata autour de 7h45, plus tôt que nos prévisions et sommes accueillis à l’entrée du village par une « officielle » qui nous demande de nous acquitter de 10 soles chacun pour les droits d’entrée sur le trek. Nous apprendrons plus tard que Clément, arrivé la veille dans l’après-midi, n’a pas eu à payer…
Il est 8h lorsque nous nous mettons en route depuis la place d’armes du village. Au programme de la journée, 22,9 km et un dénivelé positif proche de 1500 mètres (d’après le guide Apacheta disponible en ligne). Les premiers kilomètres passent sans encombre, l’altitude est encore raisonnable et le souffle correct. Nous atteignons un premier village puis le point de vue de Hornada Pata où nous faisons une pause avant de repartir pour une deuxième partie un peu plus difficile, jusqu’au mirador de Chinchirquma.
La météo est correcte mais il y a quelques passages boueux en montée, et le souffle commence à manquer au fur et à mesure de la grimpette.
Arrivés au mirador, nous nous posons et profitons de la vue sur le Nevado Tucarhuay et la vallée que nous nous apprêtons à longer. Nous venons de gravir près de 1000 mètres de dénivelé sur une dizaine de kilomètres. Il est presque midi.
Nous repartons pour la deuxième partie de la journée, plus agréable pour les jambes car les dix prochains kilomètres suivent une ligne de niveau le long de la montagne. Nous atteignons une petite zone de repos après quelques dizaines de minutes où nous décidons de nous arrêter pour pique-niquer. A l’inverse d’autres treks que nous avons fait jusqu’à présent, nous comprenons aux emménagement et aux boutiques que celui-ci doit être très animé en saison haute (de juin à septembre). Mais pour l’heure, nous sommes seuls avec une vache qui broute non loin. Nous n’avons d’ailleurs rencontré qu’un couple irlando-italien, qui était dans le même collectivo que nous le matin même. Notre solitude (tout bovin mis à part) sera de courte durée : une dizaine de minutes après nous êtres posés, un groupe de touristes accompagnés de leur guide et d’une mule arrivent et viennent s’installer au même endroit.
A peine un bonjour (sauf le guide qui nous salue amicalement), c’est le signe pour nous du départ : nous repartons pour les quelques kilomètres qui nous séparent de Soray Pampa, une plaine où des infrastructures pour touristes sont installées. D’après le guide Apacheta, c’est là que s’arrêtent les tours guidés pour la nuit et effectivement en arrivant nous voyons des troupeaux de touristes à la queue leu leu en route vers un point de vue sur la laguna Humantay.
Il commence à pleuvoir et nous voulons éviter la foule pour la soirée donc nous décidons de suivre les conseils de notre guide papier et grimpons les 2,6 kilomètres suivant (240 mètres de dénivelé) pour atteindre Salcantay Pampa, un petit plateau situé à 4145 mètres d’altitude.
Nous trouvons un emplacement parfait pour notre tente, entre quatre murs de pierre à l’abri du vent. La pluie s’est arrêtée et pour récompenser nos 8h20 de randonnées, les nuages sont en train de se lever, nous laissant apercevoir pour la première fois le Nevada Salkantay, le sommet enneigé culminant à 6271 mètres.
Nous retrouvons également Clément, parti tôt le matin de Mollepata, qui a visiblement souffert autant que nous de la montée. Une petite guérite nous permet de cuisiner à l’abri du vent et nous y retrouvons les quelques randonneurs “indépendants” de la journée : Clément donc, le français qui dormait dans la même auberge que nous, mais aussi Mélanie, une franco-suisse, Toby, un allemand et un couple suisse-allemand plus discret. Nos compagnons irlando-italien rencontrés le matin sont aussi sur le plateau mais profitent de leur solitude au loin. La nuit tombant rapidement, nous commençons à cuisiner tôt, vers 17h30, de telle sorte qu’à 19h tout le monde est prêt à aller se coucher. Pour notre part, nous éteignons à 20h, emmitouflés dans nos duvets et tout habillés de nos vêtements chauds car la nuit promet d’être froide.
Jour 2 : montée et descente
Dur dur de sortir du duvet ! Il est 7h, il fait jour depuis près de deux heures mais le soleil n’a toujours pas dépassé la cime des montagnes, la motivation nous manque pour échapper à la chaleur toute relative de nos duvets. Irène n’a pas très bien dormi, trop froid, et je me suis réveillé à plusieurs reprises pour reprendre mon souffle : peut-être les effets de l’altitude. Je sors la tête de la tente pour un coup d’œil sur la météo, j’en ai le souffle coupé. Le paysage est magnifique. D’un côté, le Salkantay est complètement dégagé, aucun nuage ne vient chatouiller son sommet. De l’autre, la vallée où nous sommes passés la veille est sous les nuages.
Nous sommes vraiment contents d’être là, à profiter quasi seuls de ces premières lueurs du jour. Nous nous décidons à sortir complètement de la tente, mettons de l’eau à bouillir avant de commencer à ranger nos affaires. Il a fait tellement froid pendant la nuit qu’il y a du givre sur la tente ! Pas étonnant que nous ayons mal dormi.
Autour de 7h30, les premiers groupes guidés commencent à arriver à notre hauteur et nous les saluons au fur et à mesure des passages, notre café à la main. Nous décollons avec Clément une trentaine de minutes plus tard pour attaquer les 460 mètres de dénivelés (3 km) qui nous séparent du col Salkantay, point culminant de la journée et du trek. La montée n’est pas des plus agréables, le souffle manque et nous marchons à petits pas, tranquillement, heureusement sous le soleil. Nous dépassons quelques groupes, obligés d’attendre leurs maillons faibles, et arrivons au col après une heure dix de montée. Nous trouvons un coin à l’abri du vent pour nous poser, vite rejoints par Toby et profitons de la vue pendant quasiment une heure. Nous savons que le reste de la journée ne sera que descente vers la vallée suivante et la village de Collpa Pampa donc nous savourons la récompense de nos efforts, contents d’avoir atteint ce col à 4630 mètres.
Mais l’heure tourne, nous nous remettons en route et entamons la longue descente semée d’embûches, ruisseaux à traverser et pierres à éviter.
Autour de 13h, nous nous arrêtons pour un pique-nique quinze minutes après le campement de Hauaracmachay, pour éviter les groupes et repartons sous quelques gouttes de pluie qui nous suivrons jusqu’à Chaullay, premier vrai village au fond de la vallée.
Comme la veille, nous savons que c’est dans ce village que s’arrête les agences donc décidons de pousser au moins jusqu’au village suivant, Collpa Pampa. Malgré les 18,5 kms parcourus, Irène et moi sommes motivés pour continuer sur 5 kms et entamer l’étape suivante afin de gagner quelques kilomètres le lendemain. En effet, nous aimerions dormir le lendemain au sommet de la seconde passe du trek, près de ruines de Llaqtapata, et pour cela entamer l’étape pour avoir moins de kilomètres à marcher le lendemain.
Nous arrivons donc à Collpa Pampa, à 2845 mètres d’altitude, dans un groupe composés des mêmes personnes que la veille au soir. Mais en nous renseignant pour continuer notre chemin, nous apprenons que le sentier que nous sommes censés prendre le lendemain est fermé pour cause d’éboulements dus aux intempéries. Coupés dans notre élan, nous décidons de faire comme tous les autres et de camper sur l’un des deux terrains de camping du village (5 soles par tente) et d’aviser autour d’une bière de notre programme de la veille. Nous sommes rejoints un peu plus tard par Mélanie, la suisse, et, ô surprise, Loeiza et Benjamin, les deux français déjà rencontrés à l’auberge qui normalement devaient partir à vélo vers la Bolivie. Ceux-ci ont décidé, sur un coup de tête, de partir pour le même trek et de décaler leur départ à vélo de quelques jours. Ils sont arrivés la veille au soir à 21h30 au camping “des groupes” et ont retrouvé Mélanie, la prenant pour Irène (une brune aux cheveux bouclés, de dos, ça se confond facilement !), sur le chemin de ce deuxième jour. Nous voilà donc un groupe de onze campeurs à ne trop savoir que faire le lendemain.
En effet, plusieurs habitants nous confirment que le sentier n’est pas praticable et que le seul moyen de rejoindre Playa Sahuayaco, d’où part le sentier qui grimpe aux ruines de Llaqtapata, est une route de 15 kilomètres. C’est d’ailleurs cette route qu’emprunteront les tours guidés le lendemain. Sauf que marcher 15 kilomètres sur une route, toute terreuse qu’elle soit, ne nous enchante guère. Tous les campeurs présents sont d’accord pour shunter cette partie et prendre un collectivo le lendemain matin jusqu’au pied du sentier qui mène aux ruines. Ainsi, nous pouvons grimper aux ruines le matin puis descendre dans la foulée jusqu’au village d’Aguas Calientes, au pied du Machu Picchu, et gagner une journée dans notre programme. Un chauffeur de taxi collectif nous ayant proposé ses services plus tôt lors de notre passage à l’entrée du village, nous retournons le voir pour négocier un tarif de groupe et un départ à 6h pétante le lendemain.
Nous mangeons tous ensemble au camping avant d’aller nous coucher avec les poules, emmitouflés comme la veille malgré la température plutôt clémente.
Jour 3 : voilà la pluie !
5h, le réveil sonne. La nuit a été bien meilleure que la veille : 1400 mètres plus bas il fait bien plus chaud, au point que nous avons dû nous délaisser de nos multiples couches de vêtements durant la nuit. Nous plions la tente pour la dernière fois de notre voyage et chargeons les sacs à dos du groupe sur le toit du collectivo, pour une fois ponctuel (pas étonnant, nous devons probablement lui payer sa journée de travail en un trajet !).
Près d’une heure de trajet après, au cours duquel nous avons constaté les effets de l’eau sur le sentier, nous sommes déposés au pied du sentier qui mène aux ruines de Llaqtapata, à 3 kilomètres au nord de Playa Sahuayaco. Nous entamons les 6 kilomètres qui doivent nous mener jusqu’aux ruines, situées plus de 800 mètres plus haut mais sommes vites arrêtés par une douce odeur de café. En effet, le début du sentier traverse des plantations de cafés et de petits stands proposent à la dégustation aux randonneurs un café fraîchement torréfié, moulu et passé. Nous faisons donc une première pause, le café est vraiment bon, loin des sachets lyophilisés servis dans les auberges ces dernières semaines.
Mais l’appel du sentier se fait sentir et nous repartons pour une grimpette difficile. Bien que nous ne sommes “qu’à” 2000 et quelques mètres d’altitude, la fatigue de ces derniers jours se fait sentir et nous mettrons près de 2 heures à parcourir les kilomètres qui nous séparent du sommet.
En chemin, la brume nous a rattrapé et nous atteignons les ruines de Llaqtapata dans une purée de pois rendant les lieux un peu mystique. Malheureusement, celle-ci masque aussi le point de vue que nous sommes censés avoir sur le Machu Picchu, de l’autre côté de la vallée.
Fatigués, nous nous posons quelques instants tous ensemble pour prendre notre deuxième petit-déjeuner de la journée. Au bout d’un quart d’heure, certains du groupe commencent à partir mais pour notre part, nous prenons notre temps : il n’est que 10h et nous avons fait le plus difficile de la journée, enfin c’est ce que nous pensions…
Lorsque nous nous décidons à repartir, c’est pour nous arrêter dix minutes plus tard devant le lodge d’où nous sommes censés voir le Machu Picchu. Entre temps, les nuages ont commencé à se lever et nous apercevons les montagnes de l’autre côté de la vallée. Il se met à pleuvoir à grosses gouttes et nous nous abritons tant bien que mal. Un chat vient même s’installer sur nos genoux. Clément et Mélanie profitent d’une accalmie pour entamer la descente tandis que nous restons à quatre avec Loeiza et Benjamin, à attendre que les nuages se lèvent pour apercevoir le site archéologique. Notre patience paye : quelques minutes plus tard, nous distinguons enfin la silhouette des ruines sur la montagne en face. Ce n’est pas très net (encore moins sur les photos) mais nous sommes contents ! Nous pouvons enfin partir !
Nous voilà donc partis, équipés pour affronter la pluie de nos pantalons et vestes de pluie. Bien sûr, celle-ci se contente de nous chatouiller les sourcils de quelques gouttes, rien de plus, il suffisait de s’équiper pour lui faire peur. Cela ne rend pas la descente plus facile : le chemin est boueux, un vrai toboggan, la pire descente que nous ayons eu à pratiquer durant nos six mois ! Chacun cherche dans les fourrés au bord du chemin une branche sur laquelle s’appuyer au cours de la descente. Après trente minutes de galère, Irène et moi nous arrêtons pour enlever notre équipement de pluie sous lequel nous étouffons et perdons de vue les deux autres qui descendent à bon pas.
Nous dépassons un groupe composé à majorité de retraités peu rassurés par le terrain puis continuons inlassablement vers la rivière en contrebas. Nous tombons nez à nez avec deux chevaux seuls sur le chemin que nous laissons tant bien que mal passer avant de croiser leurs maîtres, une dizaine de minutes plus tard, qui portent eux aussi sur leur dos des morceaux de tôles assez grands. Nous nous plaignons de notre sort mais n’envions certainement pas le leur…
Près de deux heures après notre départ du lodge, nous atteignons enfin la rivière et son pont. Et là, quelle n’est pas notre surprise de découvrir un local muni d’un carnet de tickets qui nous demande 2 soles par personnes (0,60 €) pour avoir le droit de passer le pont. Je tente d’argumenter et de négocier, déjà légèrement énervé et fatigué de notre descente mais l’homme nous fait comprendre que nous n’avons pas le choix. En bonnes poires, nous finissons par payer, à contrecœur, un peu blasés par ce racket organisé. Nous apprendrons plus tard que certains de nos amis sont passés sur le pont sans payer et que l’homme n’a rien fait pour les retenir.
Sur l’autre rive, le chemin est plat et la boue absente : joie ! Nous descendons jusqu’à la rivière nous rincer rapidement les mains pleines de boues et continuons ensuite vers Hidroelectrica, le dernier village accessible par la route avant Aguas Calientes. Hidroelectrica est ainsi nommé car on y trouve une station hydroélectrique produisant assez d’énergie pour alimenter toute la région de Cusco. Nous passons sous la cascade de rejet de l’usine avant d’atteindre la gare de train, où nous retrouvons Loeiza et Benjamin.
Nous nous joignons à eux pour pique-niquer à l’abri de la pluie, et prenons notre temps avant de repartir : il nous reste pourtant une dizaine de kilomètres de marche pour rejoindre Aguas Calientes, le village se situant au pied du Machu Pichu. Il est 15h lorsque nous nous remettons en marche, pour la dernière étape de notre journée. Nous achetons un peu de pain et quelques biscuits dans les échoppes qui bordent les rails au départ car nous nous attendons à des prix prohibitifs à Aguas Calientes et c’est parti pour 10 kilomètres ! Aguas Calientes (aussi appelé Machu Picchu Pueblo) n’est accessible qu’en train ou à pied. Le coût d’un billet de train est prohibitif : après comparaison avec mes billets d’il y 6 ans, nous avons noté une multiplication par quatre du prix du trajet, un Aguas Calientes – Ollantaytambo coûte entre 60 et 90 € pour le moins cher en fonction de l’heure et de l’anticipation à la réservation. Nous avons donc décidé de marcher, le long des rails, comme des dizaines de personnes qui arrivent directement en minibus de Cusco jusqu’à Hidroelectrica. Les rails longent la rivière Urubamba, et un chemin plus ou moins marqué longe les rails, au milieu d’une végétation luxuriante. Nous marchons à la queue leu leu, traversant les rails lorsque le sentier se fait trop petit d’un côté, la marche n’est pas très agréable et nous commençons vraiment à fatiguer de cette longue journée. Nous rattrapons Clément, puis Mélanie, avant d’arriver en vue d’Aguas Calientes où nous arrivons peu après 17h.
Notre objectif principal était d’y arriver tôt pour acheter un billet pour grimper au Machu Picchu le lendemain. Toby, arrivé une heure et demie avant nous, nous indique que le bureau de vente ferme à 20h30. Nous avons donc le temps de trouver un logement. Nous sommes abordés par une péruvienne qui voit notre groupe et nous indique qu’elle a des places disponibles. Ces explications sont un peu floues, nous ne savons pas s’il s’agit d’un dortoir ou de plusieurs chambres donc nous décidons de la suivre pour nous rendre compte sur place. Elle nous emmène un peu plus haut dans le village, dans un bâtiment dont seul le rez-de-chaussée et le dernier étage sont terminés : nous passons donc deux étages encore en travaux avant d’arriver sur le dernier palier où la petite dame nous indique une chambre dans laquelle il y a deux matelas doubles (et pas d’espace en rab), qu’elle souhaite nous louer à 15 soles / personnes. Sachant que nous sommes cinq personnes, nous sentons le plan foireux, et refusons poliment. Elle nous emmène chez une voisine où il y a un dortoir de 4 places (elle n’a pas dû voir que nous étions pourtant cinq à la suivre) et la chambre double supplémentaire est hors de prix. Nous prenons donc congé, un peu fatigué qu’elle essaye à tout prix de nous avoir dans son auberge.
Nous poussons jusqu’à une auberge indiquée dans le guide Apacheta comme pas cher (45 soles pour deux) mais en y arrivant, le propriétaire nous indique un tarif 3 fois supérieur : 120 soles pour deux personnes ! Nous lui expliquons que ce n’est pas dans notre budget et il nous dirige donc vers l’auberge en face, où de 50 soles pour deux personnes, Clément réussit à négocier nos lits à 15 soles / personne, dans deux chambres avec salle de bain privée : le grand luxe !
Nous posons ainsi nos affaires et ressortons aussitôt acheter nos billets pour visiter le Machu Picchu le lendemain.
De retour à l’auberge, comme il nous reste quelques provisions pour le trek, nous décidons de cuisiner tous ensemble dans l’une des chambres, les réchauds posés sur le bord de la fenêtre. En ce samedi soir, la rue est bruyante et une musique forte commence à se faire entendre. Nous pensons tout d’abord qu’il s’agit d’un cours de zumba, aperçu dans le gymnase adjacent en passant devant. Mais nous nous rendrons vite compte qu’il s’agit en fait de la boîte de nuit située en face de l’auberge, et c’est au doux son des musiques contemporaines de dancefloor que nous tenterons de nous reposer jusqu’au lendemain, l’insonorisation des lieux étant absente… Nous nous endormons vraiment vers 5h du matin, alors que les fêtards rentrent chez eux….
Jour 4 : visite du Machu Picchu
Après une nuit plutôt courte et désagréable, au son des “boum boum” de la boîte de nuit adjacente, nous finissons par sortir le réchaud pour nous faire un café dans la chambre sur les coups de 7h30. Nous prenons notre petit-déjeuner et nous mettons en quête de pain pour le pique-nique. En chemin, nous découvrons avec stupéfaction la file d’attente pour la navette reliant Aguas Calientes à l’entrée du Machu Picchu. Heureusement que nous avions déjà décidé de parcourir les 3 kilomètres (et 400 mètres de grimpette) à pied, afin d’économiser les 12$ / personne / trajet facturés par la mafia Machu Picchu (venant s’ajouter aux 150 soles, soit 44 € pour le billet d’entrée). Après 2 kilomètres sur du plat, nous atteignons le pont qui marque le début de la montée vers le site où un garde contrôle nos passeports et nos billets d’entrée, afin probablement d’éviter toute tentative de fraude en entrant par les côtés du site : celui-ci n’étant pas vraiment clôturé, il est sûrement faisable de s’aventurer dans la forêt une fois la rivière traversée, qui constitue le premier obstacle naturel à l’accès au site.
Le soleil montre le bout de son rayon au moment où nous entamons la montée, constituée de près de 2000 marches et qui nous prendra une quarantaine de minutes.
Arrivés en nage devant l’entrée, nous nous accordons une petite pause ravitaillement (il est normalement interdit de manger sur le site) avant de nous diriger vers le point de contrôle des billets. Nous sommes alors abordés par une guide qui nous propose d’abord une visite privée, un peu chère pour nous. Elle nous propose ensuite de réduire le prix à 20 soles / personne si nous trouvons 6 autres personnes. Un couple péruvien semble déjà intéressé, nous la laissons donc chercher quatre autres personnes et, dix minutes plus tard, nous voilà prêts pour 2h de visite guidée en espagnol. Entre temps, nous avons vu un groupe de français ne parlant pas anglais accepter une visite à 10$ / personne (environ 33 soles), nous sommes contents d’avoir amélioré notre niveau d’espagnol ces derniers mois !
Il est 10h quand nous validons notre billet et il y a foule sur le site ! De nombreux groupes accompagnés de leurs guides circulent sur le chemin marqué. En effet, la visite du site se fait depuis quelques années uniquement dans un sens et selon un chemin marqué avec quelques variantes, réalisant une boucle. Il est interdit de revenir sur ses pas et des gardiens contrôlent les sens de circulation à plusieurs endroits. Heureusement, pour le moment il est encore possible de rentrer 3 fois sur le site avec le même billet et donc pour nous de revenir sans guide après notre tour. Par contre, notre guide nous a indiqué qu’à compter de juillet 2017, on ne pourra entrer qu’une fois sur le site et obligatoirement avec un guide : la mafia Machu Picchu durcit les lois ! A priori, ce serait pour éviter les tassements des terrains dus aux nombreux passages. En attendant, il y a apparemment jusqu’à 7000 à 8000 visites par jour, alors que le quota officiel n’est que de 2500 places d’après nos infos. Visiblement, si les gens payent, ce n’est pas trop grave de leur laisser tasser la terre des incas…
Bref, nous entamons la visite par un premier point de vue d’où la guide nous explique l’histoire de la “découverte scientifique” du site archéologique, par Hiram Bingham, un explorateur américain de l’université de Yale, qui cherchait alors la cité perdue des incas de Vilcabamba où s’était réfugié le dernier inca (l’empereur du peuple quechua) lors de la conquête espagnole. Des paysans locaux connaissant l’existence du Machu Picchu (qui n’a donc jamais été perdu) y menèrent Bingham qui décida d’y rester et de mener d’autres expositions les années suivantes pour mettre à jour le site recouvert de végétation, grâce notamment au financement de son université, et récupérant au passage un certain nombre d’objets incas qui se trouvent aujourd’hui dans des musées américains (et probablement pour certains des plus précieux dans des collections privées).
Le site est divisé en plusieurs zones : religieuse, habitations de l’inca et des proches, habitations des villageois. Plusieurs théories co-existent sur l’usage du Machu Picchu (vous pouvez en découvrir certaines dans l’article Wikipédia). La guide penche plutôt pour la théorie d’une université où les jeunes de l’empire incas venaient pour une période de deux ans apprendre et expérimenter dans les domaines de l’agriculture et de la métallurgie. Elle nous parlera aussi d’un lieu de villégiature pour l’inca, situé à un mois de voyage de Cusco, et où il viendrait chercher le contact avec les dieux, forcément plus proches car nous sommes littéralement la tête dans les nuages ici.
Au fil de la visite, nous passons donc par les différentes zones du site dont la guide nous explique les fonctions supposées. Nous passons pas mal de temps à attendre le couple de péruvien, occupé à se prendre en selfie plutôt que d’écouter les explications, au grand désespoir de la guide qui nous expliquera que c’est souvent le cas avec les touristes péruviens. Au termes de deux heures et demi de tour, nous avons complété les informations déjà glanées au musée du Machu Picchu à Cusco et lues dans les guides. La guide nous raccompagne jusqu’au bout de la boucle et nous sortons du site. Il est 12h30 et il commence à faire faim donc nous profitons d’être à l’extérieur pour manger nos sandwichs pain / fromage puis ré-entrons sans encombres sur le site.
Nous commençons par suivre les conseils de la guide qui, avant de nous laisser, nous a indiqué une petite marche jusqu’à la Puerta del Sol, marquant le point d’entrée du site via le chemin de l’inca. Le sentier jusqu’à la porte du soleil grimpe pas mal et il fait très chaud au soleil. Nous entamons la grimpette, passons quelques lamas en liberté sur le site (et apparemment parfois aussi agressifs que les coatis des chutes d’Iguazu, au point de farfouiller dans les sacs des touristes à la recherche de nourriture) avant d’atteindre un mirador à mi-chemin. Nous nous y arrêtons pour observer la vue. Le site est déjà petit et sous la chaleur accablante, nous ne sommes pas motivés pour continuer plus loin : nous ne verrons pas grand chose. Alors que nous contemplons le paysage, nous sommes rattrapés par un couple de français déjà croisé plus bas. Ceux-ci viennent de recevoir un SMS de France avec les résultats des élections présidentielles. Et oui, il est un peu plus de 13h et nous avons donc officiellement un nouveau président. Ils font durer le suspens quelques secondes avant de nous annoncer les résultats. C’est donc avec une vue sur le Machu Picchu que nous aurons appris son nom.
Nous redescendons ensuite vers le Machu Picchu en passant par une zone non explorée le matin lors de la visite autour de la guérite du gardien, au pied du cerro Machu Picchu. D’ici, nous avons une superbe vue sur le site, qui s’est entre temps vidé de ses touristes : il n’y a quasiment plus personnes dans les ruines ! Nous nous posons à l’ombre d’un arbre et restons ainsi un bon moment à contempler le paysage avant de redescendre vers le site lui-même. Nous faisons ensuite un deuxième tour du site, explorant les moindre recoins autorisés : habitations des sujets proches de l’inca, grotte sous le temple du soleil, système de fontaines…
Après quelques heures de déambulation, la fatigue commence à se faire sentir. Il est presque 16h, nous sommes sur le site depuis 6h et il nous reste encore à redescendre à pied jusqu’à l’auberge. Nous décidons donc de quitter les lieux, quasi vides et rejoignons Aguas Calientes en trois quarts d’heure. Nous nous posons à l’auberge après une petite douche tiède en attendant Clément, Loeiza et Benjamin, que nous n’avons pas vus de la journée. A leur arrivée, nous décidons d’aller manger en ville, dans un restaurant local, loin de la rue principale touristique, où nous payons notre menu entrée / plat 8 soles (à peine plus de 2 €), servi par une petite grand-mère qui trouve que nous ne commandons pas assez vite et s’en va servir toutes les tables de la salle avant de revenir nous voir (une dizaine de minutes plus tard) !
Nous retrouvons ensuite Julie, une amie rencontrée initialement en Patagonie et retrouvée à Buenos Aires et à Iguazu, qui est arrivée à Cusco l’avant-veille et à Aguas Calientes dans l’après-midi. Nous buvons un verre ensemble dans le centre du village avant d’aller chacun nous coucher.
Jour 5 : retour vers Cusco
Après une nuit plus calme que la veille (visiblement, il y a moins de monde en boîte le dimanche soir que le samedi), nous plions bagages et le club des cinq que nous formons décide d’aller prendre un petit-déjeuner copieux au marché. Nous montons au comedor de l’étage et commandons nos plats, un poulet à la plancha pour moi (6 soles), une omelette pour Irène. D’autres prendront de la truite ou du lomo saltado. Nous voilà donc rassasiés pour les 11 kms qui nous séparent d’Hidroelectrica où nous comptons trouver un transport pour nous rapprocher de Cusco.
Ceux-ci nous paraissent plus faciles qu’à l’aller, probablement parce que nous n’avons pas encore une journée de randonnée dans les pattes ! Après deux heures de marche qui nous ont semblées plus courtes, nous arrivons à Hidroelectrica un peu avant 11h. Notre plan est de trouver un minibus direct jusqu’à Cusco mais nous sommes un peu tôt, les minibus des agences qui font l’aller / retour dans la journée ne sont pas encore arrivés. Par contre, il y a des chauffeurs de taxi. L’un d’eux nous aborde et nous négocions un passage jusqu’à Cusco à 35 soles / personne (l’aller-retour est facturé par les agences en ville à 60 soles). Le taxi va nous emmener jusqu’à Santa Maria, à 1h30 de route, où il s’arrangera avec un collectivo pour nous emmener jusqu’à Cusco. Nous voilà partis à cinq dans le taxi. Les plus mathématiciens d’entre vous auront déjà compris que dans une voiture standard, cela ne passe pas. En effet, nous sommes quatre à l’arrière. Mais tout va bien, c’est spacieux, il n’y a juste pas assez de ceinture pour tout le monde (mais le port de la ceinture de sécurité n’a pas été scrupuleusement suivi jusqu’à présent en Amérique du Sud, celle-ci n’étant pas toujours présente dans les véhicules que nous prenions).
Nous passons Santa Teresa et arrivés à Santa Maria, le chauffeur de taxi nous propose de nous déposer dans un restaurant local pour le déjeuner. Nous acceptons bien que n’ayant pas trop faim, étant donnée le plat copieux englouti le matin. Nous partageons donc des menus à 6 soles avant de remonter dans le collectivo, arrivé entre temps, et qui s’est lui aussi arrêté pour la pause déjeuner. Celui-ci nous mènera sans encombre jusqu’à Cusco, où il nous déposera sur les hauteurs de la ville : il nous reste donc encore 2 kilomètres à marcher pour rejoindre l’auberge. En y arrivant, nous apprenons qu’il n’y qu’une chambre de libre, avec seulement quatre lits, et uniquement pour cette nuit. Clément trouve une place dans un autre dortoir, nous dormirons donc à quatre dans la chambre.
Pour conclure ce trek et cette semaine d’aventure, nous décidons d’aller manger tous ensemble dans un restaurant un peu plus touristique de Cusco : el Imperio. Celui que nous avions repéré propose un menu à 15 soles avec entrée et plat différents des classiques péruviens : du maïs au fromage en entrée (une spécialite de Cusco), et un steak d’alpaga en plat. Les portions sont ridiculement petites et nous terminons notre soirée dans une boulangerie, où nous prenons plusieurs desserts pour combler l’absence de sucres de ces derniers jours !
Nous rentrons ensuite nous coucher, avec pour plan de nous lever tôt le lendemain pour repartir visiter la vallée sacrée et y dormir, l’auberge n’ayant pas de place pour nous le lendemain soir. Mais ceci est une autre histoire…
Retour sur nos trois premiers jours à Cusco, capitale de la civilisation inca, centre de nos pérégrinations pour les deux dernières semaines de voyage.
Jour 1 : réveil dans la ville
Nous débarquons à Cusco plutôt frais après une nuit correcte dans le bus depuis Arequipa. Il est 6h30 lorsque nous sortons du terminal et nous voilà déjà agressés par les chauffeurs de taxi qui insistent tous pour nous emmener au centre pour 6 soles. Après cette nuit passés enfermés et recroquevillés sur nos sièges inclinables, nous avons plutôt envie de nous dégourdir les jambes d’autant qu’il fait beau. Nous voilà partis en direction de notre auberge, la Estrellita, située à quelques minutes de la place d’armes. Sur tout le chemin, nous nous verrons proposer des courses en taxi, jusqu’au moment où j’appuie sur la sonnette de l’auberge… On ne sait jamais, sur un malentendu, ça peut passer !
Nous sommes attendus car j’avais appelé la veille pour réserver (pas de site internet) et l’un des patrons (ils sont quatre ou cinq à se relayer 24/24) nous propose le petit-déjeuner bien que nous n’ayons pas dormi ici. Nous acceptons avec plaisir et profitons du calme de la cours intérieure ensoleillée où sont garées quelques motos. En effet, l’auberge est un repère de motards et de cyclistes, absente des guides de voyage et des sites de réservation en ligne.
N’étant pas fatigués, nous décidons ensuite d’aller découvrir la ville et marchons dans ses rues un peu au hasard avec l’idée de préparer nos prochains jours. En ce lundi premier mai, l’office du tourisme est fermé, et nous discutons avec quelques agences des possibilités de tours (avec l’idée de les faire par nous-mêmes) tout en nous dirigeant vers le marché San Pedro. En chemin, nous nous faisons harceler par les vendeurs de rue qui proposent massages, tours vers le Machu Picchu et autres excursions : après le calme du canyon de Cotahuasi, c’est violent !
Le marché de San Pedro ne nous convainc pas plus que ça : la moitié des stands vendent de l’artisanat, et il n’y a aucun locaux autour des stands alimentaires. Nous nous disons qu’il doit y avoir un autre « vrai » marché ailleurs que nous nous promettons de chercher.
Après ce premier tour plutôt mitigé, bien que la ville soit belle, nous décidons de nous faire plaisir pour le déjeuner et nous attablons au restaurant Organika, dont les plats sont composés d’ingrédients d’une ferme biologique située dans la vallée sacrée à une cinquantaine de kilomètres de la ville. Nous prenons tous les deux de l’alpaga accompagné de gnocchis : une tuerie ! Restaurant recommandé !
Nous continuons notre tour de la ville par la visite du Qoricancha : les ruines du temple du soleil inca sur lesquelles ont été construits l’église Santo Domingo et un monastère dominicain. Nous y observons des murs aux pierres parfaitement imbriquées et lisses, typique des lieux sacrés incas, entourés d’architecture coloniale. Nous y apprenons notamment que Cusco (Qosq’o en quechua,« le nombril du monde ») était le centre de l’empire inca d’où partent les quatre chemins incas vers les quatre régions du royaume (qui à son apogée en 1493 s’étendait sur 3800 km, de la Colombie au Chili).
Après cette visite atypique, entre ruines incas et reliques coloniales, nous rejoignons Fernando et Beatrice, un couple brésilien avec qui nous avons sympathisé à Uyuni, pour prendre un verre en ville. Nous décidons d’aller au pub irlandais qui se situe sur la place d’armes, où j’étais déjà allé boire une Guinness il y a six ans lors de mon premier voyage au Pérou. Néanmoins, pas de Guinness cette fois : un panneau indique que la brasserie irlandaise n’envoie plus de fûts, la demande étant trop faible. Nous nous rabattons donc sur la Cusqueña, la bière locale.
La fatigue se faisant sentir, nous prenons congé de nos amis vers 20h et nous arrêtons dans une sandwicherie proche de notre auberge, le Chola Soy, où je déguste un très bon sandwich au lomo saltado, plat typique péruvien composé de bœuf sauté avec oignons et tomates (normalement servi avec du riz). La salade d’Irène, à l’avocat que la cuisinière est allé chercher en urgence chez les voisins, était également copieuse et délicieuse.
Jour 2 : qu’il est bon de ne (presque) rien faire
Lever aux aurores pour nous en ce mardi 2 mai. Ah non, pardon, lever vers 9h pour prendre notre petit-déjeuner au soleil avant une petite séance Skype avec nos parents. Attablés, nous faisons la connaissance de Loeiza, fraîchement débarquée de France avec son vélo, avec qui nous discutons jusqu’à midi du Pérou, de la Bolivie et du nord de l’Argentine jusqu’où elle compte pédaler. Comme nous avons tous trois faim, nous décidons de manger ensemble et nous lui faisons découvrir notre sandwicherie de la veille (toujours aussi délicieuse).
Après le repas, Irène et moi décidons d’aller visiter la cathédrale de la ville, superbe édifice qui trône sur la place d’armes. L’entrée à 25 soles (7€) comprend un audioguide avec lequel nous faisons une première fois le tour des trois bâtiments qui composent la visite puis une deuxième fois en déambulant pour découvrir les détails des nombreuses œuvres d’art et autres détails architecturaux. Nous découvrons ainsi une peinture de la vierge Marie à l’enfant mais… toujours enceinte ! En effet, le ventre rond symbolise la Pachamama, la mère nourricière du peuple quechua. La représentation de la Cène figure un cuy, le cochon d’Inde toujours considéré comme un met de choix pour les péruviens. Nous passons également devant un Christ noirci par la fumée des cierges, el señor de las temblores, ainsi appelé car lors du tremblement de terre dévastateur de 1950, les secousses se seraient arrêtées au moment où la statue du Christ fût déposée au sol. Depuis, il est vénéré par les cusqueniens. Nous apprenons enfin la signification des miroirs : symboles de vanité en Europe, pour les indiens ils permettent au contraire de refléter l’âme. Banni de nos églises, on les retrouve donc à foison ici ! De tout ceci, point de photos, interdites à l’intérieur de l’édifice.
En sortant, le ciel bleu a laissé la place à la pluie. Les vendeurs de rue s’adaptent en quelques minutes et les bonnets péruviens sont remplacés par des ponchos en plastique, moins typiques. Nous filons jusqu’à l’auberge pour le goûter, celle-ci est située juste à côté d’une boulangerie française où nous trouvons de vrais pains au chocolat.
Il est un peu trop tard pour aller au musée du Machu Picchu que nous souhaitons faire avant de visiter le site donc nous optons pour le musée du chocolat. Celui-ci, gratuit, est en fait un préambule à une boutique vendant toutes sortes de produits basés sur le chocolat. La visite guidée est expresse mais intéressante : nous apprenons toutes les étapes de confection du chocolat, depuis la récolte des fèves de cacao jusqu’à la production finale. La visite se termine par une dégustation des différents produits, nous testons donc avec application les multiples liqueurs et types de chocolat.
Nous rentrons ensuite à l’auberge avant de ressortir manger une vraie pizza, cuite au feu de bois, au Tabuco. Les pizzas sont modelées sous nos yeux, le four est au milieu de la salle du restaurant. Et les pizzas sont bonnes, la pâte est fine, la bella vita !
Jour 3 : préparation du trek
Ne faillissant pas à notre habitude, nous traînons au soleil quasiment toute la matinée, à discuter avec un couple de motards belges, Loeiza, et Clément, un français qui part pour le trek du Salkantay, comme nous.
Nous apprenons avec les belges qu’il y a un vrai marché à quelques centaines de mètres de notre auberge. Nous nous y rendons pour faire des provisions pour le trek puis rejoignons Fernando et Béatrice pour le déjeuner, chez Heidi, un restaurant tenu par un allemand et proposant un menu du midi à 28 soles (environ 8€, un peu cher pour le Pérou). Nous y mangeons une sorte de hachis parmentier et un bon gâteaux à la crème.
Nous commençons l’après-midi par la visite de la casa qoncha, un musée consacré Machu Pichu et à l’histoire de sa découverte. Celui-ci constitue une intéressante introduction au site inca, un diorama animé accompagné d’une vidéo permet de découvrir les différentes zones du site. Quelques salles présentent des objets quasi intacts issus des fouilles archéologiques et la dernière partie explique comment, grâce aux nouvelles technologies, les scientifiques continuent d’en apprendre encore plus sur les lieux.
A l’issue de la visite, nous retournons à l’auberge où nous retrouvons le groupe de francophone occupé à ne rien faire. Nous nous joignons à eux, nos courses étant faites pour le départ matinal du lendemain. A l’heure du goûter, surprise ! Nos amis brésiliens étant passés dans une boulangerie nous ont acheté une baguette fraîche, un peu cliché mais vraiment sympa !
En fin d’après-midi, nous nous rendons au marché artisanal pour y dégoter quelques souvenirs mais rien ne nous plaît. En revanche, sur le chemin du retour, nous passons devant une galerie d’art exposant des œuvres originales de l’artiste, différentes en style de toutes celles que l’on trouve sur la place d’armes. Nous craquons et achetons de quoi décorer notre futur appartement. Comme nous partons pour quelques jours, nous réservons les toiles que nous irons chercher à notre retour.
Nous terminons cette petite journée par un dîner rapide dans un des nombreux restaurants qui proposent des menus « touristiques » à moins de dix soles, sans intérêt, avant de rentrer nous coucher car nous partons le lendemain à 5h30 pour le trek du Salkantay en solo (c’est-à-dire sans agence).
Deux semaines avant la fin de notre voyage (dur dur), nous partons ce jeudi matin pour une dernière randonnée en autonomie : le trek du Salkantay.
Ce trek qui dure quatre jour en moyenne permet de rejoindre la ville d’Aguas Calientes, point de chute des visiteurs à destination du Machu Picchu. Les variantes étant nombreuses, nous déciderons sur l’instant de notre parcours final en fonction de la météo, de la fatigue et des rencontres que nous ferons sans nul doute en chemin !
A bientôt pour le récit de nos dernières aventures péruviennes.
Le lac Titicaca côté Pérou : Puno, Amantani, Llachon
Il est 16h passée lorsque notre bus arrive au terminal de Puno. A peine le pied posé dans le terminal, nous nous faisons aborder par une rabatteuse qui veut nous vendre le tour classique de deux jours sur les îles du lac. Nous esquivons et rejoignons un petit hôtel recommandé par le routard, où nous croisons donc uniquement des français. Nos sacs posés, nous ressortons aux dernières lueurs du jour : avec le décalage d’une heure en passant au Pérou, le soleil se couche ici à 17h30 et il fait nuit à 18h !
Nous nous rendons à l’office de tourisme pour glaner quelques informations sur les îles puis, après un passage rapide dans la rue piétonne, nous rentrons sous une pluie battante pour passer la fin d’après-midi à lire des articles de blogs et autres guides en ligne sur le Pérou.
Nous profitons d’une accalmie pour sortir manger, dans la rue piétonne où tous les restaurants proposent des menus « touristiques » (au moins, ils ne s’en cachent pas) pour une vingtaine de soles (6 €). Nous verrons le lendemain que quelques rues plus loin, des petits restaurants proposent les mêmes menus pour 5 ou 6 soles…
De retour à l’hôtel, nous continuons nos recherches avant de sombrer d’un sommeil profond sous une quadruple épaisseur de couverture, il fait froid la nuit à 3800 mètres !
Jour 1 : visite de la ville
Nous traînons au lit jusqu’à 10 h avant de changer de chambre, la notre étant réservée pour le soir.
Nous commençons notre tour de la ville par un passage sur le port : notre décision est prise, nous voulons visiter la presqu’île de Capachica puis l’île d’Amantani et nous allons donc voir si nous pouvons trouver une embarcation qui nous déposera sur la presqu’île, en chemin vers les îles.
Sur le port, il y a trois guérites, appartenant à différentes associations de marins, une pour chaque île :
Les îles Uros, îles flottantes construites sur des roseaux. Les visites durent environ trois heures.
L’île de Taquile, une des deux grandes îles du lac côté péruvien, à 2h30 environ de Puno. La visite proposée se fait à la journée.
L’île d’Amantani, à 3h de Puno. Les marins proposent le même tour que les agences, sur deux jours : départ vers 8h, arrêt d’une heure aux îles Uros puis navigation vers Amantani où l’on est pris en charge par une famille jusqu’au lendemain matin. Le deuxième jour classique est un retour vers Puno avec un arrêt à Taquile de quelques heures.
Comme nous voulons aller à Amantani, c’est vers cette dernière guérite que nous nous dirigeons. Nous discutons avec Néné, capitaine de l’embarcation qui part le lendemain, qui nous explique qu’il est plus facile pour nous de commencer par la nuit sur l’île d’Amantani et, au lieu de rentrer par Taquile, de prendre un bateau taxi collectif depuis Amantani jusqu’à la presqu’île de Capachica le jour suivant. Comme les bateaux collectifs partant d’Amantani sont gérés par la même association, il nous propose pour le même prix de prendre ce transport le surlendemain. Nous acceptons et donnons donc rendez-vous à Néné le lendemain à 8h.
La faim se faisant sentir, nous nous rendons au marché dans l’espoir d’y trouver de quoi manger. Nous craquons un peu devant tous ces étals et achetons pain, fromage, olives, œufs, pommes et oignon pour nous faire à manger à l’hôtel.
Nous retournons ensuite en ville pour nous balader. Nous commençons l’après-midi par la place d’armes, un incontournable des villes péruviennes. Nous traversons la cathédrale avant de grimper à la colline Huajsapata. Essoufflés, nous contemplons quelques instants la vue avant de redescendre en quête d’une carte SIM. Et oui, la visite de la ville aura été rapide : ce n’est pas la ville la plus excitante de notre périple mais nous la trouvons néanmoins plus agréable que les quelques villes boliviennes traversées.
Après un deuxième passage au marché pour préparer nos quelques jours d’excursion, nous terminons l’après-midi à l’hôtel avant de sortir manger une pizza,au restaurant El Buho, dont je rêvais depuis quelques jours. Les pizzas sont bonnes et la pâte fine : une bonne adresse.
Jour 2 : îles Uros et Amantani
Nous quittons l’hôtel peu avant 8h après y avoir laissé une partie de nos affaires pour embarquer sur le Royal Caribbean, le bateau de Néné. Nous apprendrons plus tard que l’association des marins d’Amantani compte une quarantaine de bateaux et qu’un système de roulement leur permet à tous de proposer le tour de deux jours environ une fois par mois.
Nous naviguons dans un marais jusqu’au îles flottantes, premier arrêt de la journée. A notre arrivée, nous voyons de part et d’autre du bateau des îles en roseaux séchés sur lesquelles des groupes d’individus nous font des grands signes. Nous comprenons qu’ils essayent d’attirer l’attention du capitaine pour que celui-ci accoste sur leur île.
Nous approchons l’une d’entre elles et sommes accueillis en aymara, la langue des indiens au sud du lac (celle parlée sur la isla del sol).
Nous nous rassemblons autour du « président » qui nous explique d’abord comment sont construites les îles. Tous les ans, les habitants vont couper des mottes de terres flottantes qui sont ensuite arrimées entre elles et ancrées au fond du lac. Sur ces piliers sont déposés des couches de totoras séchées, le roseau local. Les couches doivent être renouvelées tous les dix jours car les couches inférieures s’imbibent d’eau au fur et à mesure. Il nous explique ensuite la vie sur l’île, dans des petites cabanes non chauffées. Des panneaux solaires leur permettent d’avoir un peu d’électricité. Nous avons le droit à une visite d’une des habitation suivie d’un passage par une exposition des fabrications des habitants : bonnets, écharpes, bibelots…
Avant de partir, nous sommes de nouveau rassemblés pour une session « chorale » où toute la communauté nous chante d’abord un chant en aymara puis en quechua (l’autre langue des indiens du Pérou, parlée sur Amantani et Taquile notamment), en espagnol, en anglais et une interprétation phonétique de « alouette, gentille alouette ». Après ce spectacle un poil trop touristique pour nous, nous sommes invités à monter dans une embarcation à la frontière entre le drakkar en totora et le pédalo en forme de canard. Nous refusons poliment et rejoignons le Royal Caribbean en attendant que certains du groupe terminent leur tour « typique ».
Cette visite des îles flottantes nous laisse un peu dubitative : la mise en scène donne un peu l’impression d’un parc d’attraction pour touristes et nous avons du mal à croire que l’île visitée est effectivement habitée toute l’année. En discutant avec d’autres touristes du bateau, cette impression est partagée.
Peu importe, nous voguons maintenant en direction d’Amantani, sous un grand soleil. Nous passons devant la péninsule de Capachica et laissons l’île de Taquile à tribord avant d’accoster aux alentours de 13h30 sur Amantani.
Néné, notre capitaine, nous répartit dans nos familles d’accueil sous l’oeil bienveillant d’une représentante du village. Ici, comme pour les bateaux, les familles tournent pour accueillir des touristes chacune leur tour, afin qu’aucune ne soit lésée. Nous nous voyons donc attribués à la señora Libia. Nous serons sept à dormir chez elle : deux couples de français (dont nous), un couple québécois et une singapourienne. Nous nous rendons à la queue leu leu jusqu’à la maison où nous logeons, Libia nous montre nos chambres (nous avons le droit à deux lits 1,5 places) et nous annonce que nous pouvons nous reposer quelques minutes avant le déjeuner.
Nous sommes un peu déçus d’être tomber dans un groupe aussi grand et ne comprenons pas tout de suite pourquoi d’autres familles n’ont eu le droit qu’à deux ou trois invités. Peut-être est-ce une question de place. Ou peut-être est-ce aussi dû au fait que le mari de notre hôte n’est autre que… Néné ! Et oui, alors que nous nous attablons, nous comprenons que nous sommes dans sa famille car il vient aider sa femme en faisant le service à table. Nous avons le droit à une soupe de maïs en entrée, suivie d’une assiette de pommes de terre, habas(une sorte de fève, servie avec la cosse, de la famille vicia faba) et d’une tranche de fromage frit à la poêle. Nous n’aurons même pas la chance de manger avec nos hôtes.
Après le repas, Libia propose de nous accompagner jusqu’au sommet de l’île pour une balade. Nous partons donc tous ensemble, Irène et moi en tête à poser des questions sur la vie de la communauté Lampayuni, l’une des dix communautés de l’île. Nous apprenons ainsi que cette communauté compte 80 familles et l’île près de 3000 habitants. Il y a écoles et collège publiques sur l’île, permettant aux enfants d’être scolarisés gratuitement jusqu’à leurs 17 ans. Après, les places à l’université publique et gratuite sont chères (1000 places à Puno pour 10 000 postulants) et même en cas d’acceptation, il est compliqué pour les îliens d’étudier sur terre car cela engendre des coûts (location d’appartement, nourriture…) auxquels ils ne peuvent pas tous subvenir.
Après une quinzaine de minutes de marche, nous arrivons sur la place d’armes de la communauté et Libia s’arrête là pour finalement nous donner les indications pour continuer seuls.
Nous traînons sur la place d’armes avant de repartir vers les sommets. En effet, l’île d’Amantani comporte deux sommets : le Pachatata à 4085 mètres et le Pachamama à 4120 mètres au dessus du niveau de la mer. Nous suivons le sentier jusqu’à la bifurcation et décidons de commencer par le plus haut, car un groupe de touristes squatte le sentier vers Pachatata.
Nous arrivons au sommet, seuls, mises à part deux locales qui préparent leur stand en étalant leur artisanat au sol. Il n’y a vraiment personne au sommet, nous nous posons quelques instants pour profiter de la vue et reprendre notre souffle : même si nous ne souffrons plus du sorroche, le mal des montagnes, l’oxygène est plus rare à cette altitude ! Nous faisons le tour de la colline, nous longeons différentes cultures en terrasse dont du blé. Nous apprendrons plus tard que les habitants pratiquent la culture en jachère sur quatre années (une année maïs, une blé, une pomme de terre et une de repos). La majorité des cultures de l’île (pour ne pas dire la totalité) sert à nourrir ses habitants qui ne vendent plus rien au marché. C’était le cas auparavant mais les générations adultes actuelles représentant souvent des fratries importantes, les parcelles ont été divisées en de multiples petits lopins juste assez grands pour nourrir leurs propriétaires.
Après avoir profité de la quiétude de ce sommet voué au culte de la terre nourricière (la déesse Pachamama), nous décidons de monter sur le Pachatata. En chemin, nous sommes d’abord étonnés de voir plusieurs stands d’artisanat qui n’étaient pas là à l’aller. Notre étonnement est de courte durée car nous commençons à croiser des groupes de touristes qui grimpent au sommet avant de nous trouver confronter à une horde de touristes au sommet du Pachatata. Les agences ont débarqué ! Les bateaux affrétés par les agences de Puno, qui offrent exactement le même tour pour exactement le même prix (voire plus cher), sont partis 30 minutes après nous et nous voilà rattrapés par tout ce petit monde. Nous faisons rapidement le tour du sommet et fuyons la foule en redescendant par un autre côté,vers notre communauté d’où nous observons le soleil se coucher derrière la presqu’île de Capachica.
Nous rentrons vite avant que la nuit tombe et attendons l’heure du dîner en discutant avec nos compagnons. Pour le dîner, Néné se joint à nous ainsi que sa fille (et Libia après avoir terminé de préparer le repas). Nous avons le droit à une soupe d’orge (avec patates et autres légumes également) suivie de spaghettis accompagnées d’une sauce à la tomate.
Néné s’avère très bavard, il nous explique entre autre le système de jachère de l’île et nous comprenons au fil de la discussion que la vie n’est pas facile pour eux. Ils se nourrissent uniquement de ce qu’ils produisent et économisent pour donner une chance à leur fille unique d’étudier plus tard. C’est d’ailleurs pour mettre toutes les chances de leur côté qu’ils n’ont qu’un enfant. La discussion portera également sur les croyances de l’île et les cultes à la terre encore pratiqués par la population quechua qui l’habite. Nous apprendrons ainsi qu’il ne faut pas aider un homme frappé par la foudre mais attendre que la foudre le frappe une deuxième fois pour le ranimer puis une troisième fois pour lui donner son pouvoir : c’est ainsi que l’on devient chaman !
Avant d’aller nous coucher, nous redescendons offrir à nos hôtes quelques bananes achetées la veille au marché. Il n’y a pas beaucoup de fruits sur l’île et ceux-ci sont une denrée rare dans les familles. Nous comprenons aux sourires de nos hôtes que ce petit cadeau, pour nous, fera des heureux.
Jour 3 : la presqu’île de Capachica
Nous nous réveillons tranquillement vers 7h pour le petit-déjeuner. Nous avons le droit à des pancakes ! Ceux-ci engloutis, nous nous mettons en route vers le bord du lac, et suivons notre hôte qui doit nous indiquer quel bateau prendre pour rejoindre la péninsule. Nous quittons nos compagnons d’un jour, qui eux se dirigent vers le bateau de Néné pour rejoindre l’île de Taquile, et embarquons sur le bateau taxi collectif.
Une heure plus tard, vers 9h, nous voilà débarqués sur la plage de Chifron. Nous avons le choix entre prendre un taxi pour 2 km jusqu’au village de Capachica ou de marcher. Il y a peu de taxis et pas mal de gens qui sont descendus du bateau. Comme nous avons le temps, nous décidons de marcher et de laisser nos places de taxis à ceux qui en ont besoin.
Nous atteignons assez vite le village où nous faisons quelques courses pour le pique-nique avant de sauter dans un collectivo à destination de Llachon, un petit village à 14 km de là, perdu au bout de la presqu’île. Heureusement, grâce à nous le bus est rempli et peut donc partir (généralement, les collectivos ne partent que lorsqu’il y a assez de monde, sauf pour ceux à horaires fixes).
Arrivés à Llachon, au terminus, nous sommes les seuls restants dans le bus. Nous descendons et commençons à marcher vers le bout de la presqu’île où nous savons qu’il y a une auberge, « la casa de Felix », qui accueille les touristes. Nous sommes tout de suite rattrapés par un local, Yogi, qui nous demande si nous cherchons un logement. Nous lui répondons par l’affirmative et il nous propose de nous amener chez lui, il tient une auberge communautaire avec sa famille. Nous discutons en chemin (enfin, je discute tout seul, Yogi est timide et répond aux questions succinctement) avant d’arriver dans la petite cours fleurie de l’auberge. La chambre nous convient, même si le confort est spartiate : les matelas sont posés sur des blocs en béton en guise de sommier et l’eau courante absente dans les WC (il faut remplir un saut pour tirer la chasse d’eau). Elle a le mérite d’être peu chère : 45 soles par personne, dîner et petit-déjeuner inclus.
Nous nous installons et faisons connaissance avec la femme de Yogi (dont nous n’avons pas saisi le nom) et le père de sa femme, Pedro, qui a donné son nom à l’auberge : la casa de Pedro et Anilton (Anilton est le fils de Pedro, nous ne le verrons pas). Ils sont tous les trois très timides et on sent qu’ils n’ont pas l’habitude de recevoir des touristes. Nous décidons d’aller nous balader en bord de lac, avec notre pique-nique et marchons donc une trentaine de minutes, de plages en plages, jusqu’à une plage qui nous semble plus sympa que les autres, où les cochons vivaient à quelques mètres du rivage. Nous y pique-niquons et profitons du calme du lieu : il n’y a personne, seuls quelques bateaux passent au loin.
Nous remontons ensuite vers l’intérieur de la presqu’île, passant par hasard devant la casa de Felix où nous voyons deux / trois touristes sur la terrasse. Nous sommes content d’avoir trouvé un endroit moins fréquenté. Nous continuons jusqu’au bout de la presqu’île et grimpons une petite heure sur la dernière colline (4030 mètres d’altitude) d’où nous observons les deux îles du lac, Taquile et Amantani. Toujours personne à l’horizon !
Nous terminons la journée tranquillement en grimpant au sommet de la presqu’île, le cerro Carus (4150 mètres), d’où nous pouvons apprécier la vue à 360° sur la région. Nous y restons jusqu’au coucher du soleil, à l’abri du vent, quel calme ! Il nous faut néanmoins redescendre assez rapidement : il est 17h30 et il fait nuit dès 18h. Nous crapahutons donc sur les trois kilomètres jusqu’à notre auberge que nous trouvons grâce à la lampe frontale. Bilan de la journée : nous avons croisé quelques locaux qui rentraient avec leurs bêtes sur les chemins et aperçu de loin quelques autres affairés aux travaux des champs.
Sur les coups de 19h, notre hôte vient frapper à la porte pour le dîner. Il n’y a que deux couverts dans la salle à manger, nous apercevons les enfants de la maison attablés dans la cuisine adjacentes : nous mangerons donc seuls ce soir. Au menu, soupe en entrée suivie d’un plat de riz, patates, fromage frit. Au cours du repas nous aurons le droit au défilé des membres de la famille qui passent par la salle à manger pour rejoindre la cuisine et viennent nous saluer. Seul Gabriel, le beau-frère de nos hôtes (le mari de la sœur de la femme de Yogi), vient s’installer à notre table alors que nous terminons de manger. Nous entamons la discussion et comprenons qu’il en profite pour améliorer son espagnol. En effet, ici, comme sur les îles, tout le monde parle Quechua et Gabriel vient de Taquile où sa génération n’a pas appris l’espagnol étant enfant. Il nous explique tous les liens de famille entre les personnes rencontrées. Lui et sa femme ont eu maison un peu plus loin mais vivent temporairement ici car sa femme, malade, préfère être avec sa soeur la journée d’autant qu’ils ont un bébé de quelques mois. Il y a donc au moins six adultes et cinq enfants qui vivent ici. Ça fait du monde dans la cuisine alors que nous sommes seuls sur une grande table ! Je discute un peu de Taquile avec Gabriel, que j’ai visitée il y a six ans, et nous nous rendons compte qu’il connaît mon hôte de l’époque, Celso. Le monde est toujours aussi petit…
Contents d’avoir quand même pu partager un peu avec un membre de la famille, nous prenons congé alors qu’il est le seul encore debout. Il doit être 20h et tout le reste de la famille nous a déjà souhaité la bonne nuit en passant.
Jour 4 : retour à la civilisation
Au petit-déjeuner, pancakes et beignets ! Nous sommes gâtés.
Avant de partir, le femme de Yogi étale son artisanat dans la cours : elle tisse de jolies écharpes que nous trouvons un peu chères et nous rabattons sur un porte-clé souvenir. Nous prenons congé et marchons jusqu’au centre de Llachon d’où part le collectivo. En chemin, nous croisons beaucoup plus de monde que la veille : enfants qui se rendent à l’école, locaux qui vont au champ avec leurs ânes, vaches ou moutons…
Le collectivo est là, vide, sur la place du village. Nous partons après une bonne demi-heure d’attente en direction de Capachica où nous prenons un deuxième collectivo direction Puno, que nous rejoignons en un peu plus d’une heure.
Nous avons décidé la veille, en discutant en haut de la colline, de changer notre plan initial (aller à Cusco) pour faire un crochet vers le sud du Pérou direction Arequipa. Nous passons donc prendre nos affaires laissées à l’hôtel puis avalons un menu à cinq soles dans un restaurant local avant de filer au terminal où nous trouvons un bus pour Arequipa (il en part régulièrement) pour vingt soles avec Alas del Sur.
Le bus partira avec quarante minutes de retard, la compagnie étant en train de vendre des billets jusqu’au bout. C’est probablement ce qui arrive quand on choisit une compagnie moins chère.
Après six heures d’une route mouvementée, le chauffeur étant très brusque limite dangereux, nous arrivons enfin à Arequipa où nous prenons un taxi officiel (il y a beaucoup de faux taxis ici) jusqu’à l’auberge pour un repos bien mérité.
Tupiza, 7h du matin en ce lundi 10 avril. Attablés à la table du petit déjeuner de notre hôtel, nous attendons avec impatience l’arrivée des pancakes en sirotant un vrai jus d’orange : des oranges pressées et pas une poudre immonde mélangée à de l’eau comme nous en avons eu dans la majorité de nos auberges en Amérique du Sud.
Aujourd’hui, nous partons en excursion pour quatre jours et trois nuits dans la région du Sud Lipez jusqu’au salar d’Uyuni, la plus grande étendue de sel au monde.
Jour 1 : traversée du Sud Lipez
7h30. Notre chauffeur arrive à l’hôtel avec son 4×4 pour nous récupérer. Après un comparatif des agences en ville la veille, nous avons choisi Alejandro Tour. Dans la voiture, nous faisons connaissance avec Rolando, notre chauffeur pour ces quatre jours, et avec nos compagnons de route : Camille et Maël, deux bretons (ils sont partout !) qui voyagent en Amérique du Sud.
Après un arrêt à la boulangerie où notre chauffeur achète du pain pour ces quatre jours, nous voilà partis pour la première étape de notre expédition : la traversée du Sud Lipez depuis Tupiza jusqu’à l’entrée du parc national Eduardo Avaroa, 350 km au total.
A la sortie de Tupiza, nous nous engageons sur une piste de terre en direction de notre premier arrêt, le Sillar (selle de cheval) et la vallée de la lune. En route, Rolando nous donne quelques informations sur la géographie des lieux ainsi que sur les différentes espèces de plantes et animaux que l’on rencontre. Nous discutons avec nos compagnons de route, et j’apprends que les parents de Camille sont voisins des miens (à 15 km près), le monde est petit !
Au point de vue sur le Sillar nous rejoignons le deuxième 4×4 de l’agence. Il y a également quatre personnes dans la voiture : Aurore, Florian, Catherine et Nath. Outre leur chauffeur, Victor, une passagère très importante fait également partie de la voiture numéro deux : Georgia, notre cuisinière.
Nous reprenons la route, nous croisons quelques pickups chargés de travailleurs allant à la mine : on trouve de tout aux alentours, or, argent, cuivre, zinc, … Apparemment les conditions de travails sont très inégales entre les mineurs travaillant pour des grandes multinationales et ceux qui bossent à leur compte ou au sein d’une communauté. Nous roulons quelques heures avant de faire une pause bien méritée (pour le chauffeur) dans une vallée où paissent des lamas et alpagas. Nous avons le droit à une boisson chaude, thé ou maté en sachet et un morceau de pain.
Nous continuons encore près de deux heures avant de nous arrêter au bout d’une route à peine dessinée. Nous sommes aux portes de la ciudad del encanto, la ville de l’enchantement, une formation de sable pétrifiée impressionnante de part sa taille, ses couleurs et sa présence au milieu de la pampa. Pendant que nous nous baladons au milieu des pics de sable, Georgia prépare le déjeuner. Et quinze minutes plus tard, nous voilà attablés, enfin assis à l’ombre d’un monolithe, une milanaise de poulet accompagnée de riz dans l’assiette. Probablement une des meilleures milanaise que j’ai pu manger en Amérique du Sud.
Rassasiés, nous repartons et avalons les kilomètres jusqu’au village de San Antonio de Lipez, que nous traversons avant de rejoindre un village fantôme situé à quelques kilomètres. Nous sommes accueillis par un guide qui nous montre quelques échantillons de minerais que l’on trouve dans la région et nous explique que le village a été abandonné suite à une épidémie concomitante avec l’enfermement du diable pour une période de mille ans, qui a entraîné l’épuisement de tous les filons. C’est un peu confus ? C’est normal, pour nous aussi. Nous avons l’occasion de ramper quelques mètres dans un tunnel encore ouvert, mais le boyau est vite inondé. Nous nous baladons ensuite dans le village avant de reprendre la route.
Dernier arrêt de la journée : la laguna Morijon et son point de vue à 4855m d’altitude. Nous avons encore 2h de route devant nous, et rejoignons le village de Quetena Chico peu après 20h, non sans avoir assisté à un magnifique lever de lune. Surprise : nous devions avoir un dortoir, nous avons des chambres pour deux ! Après un repas tardif, que certains trouvent trop léger après cette longue journée, nous nous mettons au lit vers 23h tandis que Georgia prépare le repas du lendemain midi.
Jour 2 : la réserve naturelle Eduardo Avaro
Hier était la plus longue journée de ces quatre jours. Aujourd’hui, nous restons dans le parc Eduardo Avaroa, au sud ouest de la Bolivie, pour en découvrir les merveilles géologiques et géothermiques.
Debouts à 6h30, notre premier petit-déjeuner est composé de boissons chaudes et de pain, plutôt dur, limite biscotte, accompagné de beurre, confiture (plutôt de la pâte de fruit liquide) et de dulce de leche. Nous partons peu après 7h, l’ambiance est plutôt calme dans la voiture. En particulier, Rolando n’est pas très bavard ce matin. Nous mettons ça sur le coup du réveil matinal et profitons des paysages. Nous nous arrêtons devant deux lacs sympathiques, dont un où l’on peut observer des marais salants de borax, l’un des cristaux qui se sont déposés dans la région lorsqu’elle était sous l’eau.
De retour dans la voiture, je reconnais une chanson de Scorpions, mon groupe préféré. En effet, dans la liste des « engagements » de Alejandro Tour, il y a le fait que nous aurons de la bonne musique. Je ne peux qu’approuver la playlist de Rolando. Celui-ci ne déride pas quand je lui fais part de mes goûts musicaux et après quelques minutes, finit par nous expliquer qu’il « fait la moue » parce que nous ne semblions pas satisfaits du repas de la veille. Il nous explique que le premier soir, il y a un peu moins de nourriture pour éviter les désagréments dus à l’attitude le lendemain (nous montons jusqu’à 5000 m aujourd’hui). Comme nous prenons ça avec le sourire, peu concernés par les critiques émises la veille, il reprend son rôle de guide et nous décrit le paysage, nommant les sommets, puis nous propose un détour pour voir quelques flamands roses (d’autant plus roses qu’ils sont vieux, ayant mangé d’avantage de plancton rose qui leur donne cette teinte) avant de nous mener jusqu’à la première attraction de la journée : une baignade en eau chaude.
Il est 10 h du matin, nous sommes en maillots de bain à plus de 4000 m d’altitude et nous voilà dans une eau à 37°. Nous y passons une vingtaine de minutes, pas plus pour éviter la déshydratation, mais une petite heure sur site avant de reprendre la route, direction le « désert de Dali », ainsi nommé car parsemé de rochers aux formes originales, projetés il y a des milliers d’années par l’explosion d’un des volcans de la région.
C’est devant un volcan, le Licancabur, qui culmine à 5920 mètres que nous nous arrêtons ensuite. La laguna verde, dont la couleur est issue des minéraux qui s’y trouvent, complète le paysage. Derrière les montagnes, le Chili : nous sommes à l’extrémité sud-ouest de notre périple.
Nous faisons une pause déjeuner à quelques centaines de mètres, à l’abri du vent, pour savourer les plats de Georgia, avant de rebrousser chemin jusqu’aux eaux thermales du matin.
Nous les dépassons pour rejoindre le cratère Sol de Mañana, qui s’étend sur plusieurs kilomètres, et au fond duquel nous pouvons observer quelques fumerolles et des zones de boues frémissantes. La température des eaux à 80°C et l’odeur de soufre nous ramène quelques mois en arrière vers notre séjour à Rotorua.
Dernière étape de la journée, la laguna Colorada, où nichent des centaines de flamands roses. Nous marchons le long du lac, où l’odeur est assez forte : des cadavres d’oisillons se décomposent ça et là. Ceux-ci n’ont pas su se relever ou ont été piétinés par leurs grands frères… Le spectacle des flamands roses est néanmoins magnifique, nous pouvons les voir se déplacer prudemment dans la vase ou s’envoler lorsqu’un touriste approche de trop.
Après avoir un peu traîné près du lac, nous partons vers le village qui doit nous accueillir le soir même. Rolando est inquiet car il y a plus de 4×4 sur cette branche de la route que d’habitude. En effet, au niveau de la laguna Colorada, les tours ont le choix de prendre l’itinéraire à l’ouest, dit « classique » ou celui à l’est, l’alternatif. Nous avons choisi entre autre le tour Alejandro car ils proposaient le circuit alternatif tandis que les autres agences de décident au dernier moment. Il semblerait que beaucoup d’agences aient choisi l’alternatif ce soir, ce qui inquiète notre guide. Après une bonne heure de route, nous arrivons à Villa Mar, devant l’auberge qui accueille normalement notre agence : pas de place. Petit stress, nous nous dirigeons vers une deuxième puis une troisième auberge, aucune n’a de place pour nous… Notre chauffeur nous mène devant une dernière auberge, qui est en fait un hôtel plus luxueux. Celui-ci demande 150 bolivianos (environ 20 €) par personne supplémentaire pour nous loger. Il fait presque nuit mais nous trouvons cela un peu abusé, et refusons. Rolando propose de nous mener jusqu’au village suivant, à deux heures de route, mais cela nous ferait rater les ¾ des arrêts du lendemain. Nous ne sommes pas du tout chauds, cela reviendrait à faire une journée de voiture uniquement. Nous proposons de dormir sous la tente et je suggère à Rolando que nous pourrions dormir chez l’habitant. Il retourne se renseigner à la troisième auberge qui finalement veut bien nous accueillir pour un surcoût de 10 bolivianos par personne. A ce prix, nous dormons à quatre dans une chambre, comme prévu, et avons accès à une douche chaude ! Nous acceptons tous sans hésiter, il fait bien sombre et nous sentons que Rolando est à court de solutions. L’auberge s’avère confortable et nous y passerons une bonne soirée à discuter autour du bon repas et des cocktails de l’équipe qui a retrouvé le sourire après ce petit coup de stress.
Jour 3 : remontée vers le salar
Pour ce troisième jour, nous pouvons faire la grasse matinée : départ programmé à 8h. Georgia nous a préparé des pancakes pour le petit déjeuner, la classe ! Le ventre plein, nous embarquons direction la « copa del mundo », une formation géologique qui rappelle le fameux trophée. D’autres y voient un visage.
Nous nous arrêtons ensuite devant une formation aux allures de dromadaire puis un peu plus loin, nous nous baladons dans un labyrinthe de roches, « Italia perdida », ainsi nommé car il y a quelques années, un touriste italien s’est perdu et a été oublié par son guide dans ce labyrinthe. Il a heureusement eu la jugeote de grimper sur la colline voisine d’où il a aperçu le village de Villa Mar où il s’est rendu à pied, sous le soleil de plomb.
Après ce crapahutage, nous reprenons la route vers le nord. Aujourd’hui, Rolando a sorti la playlist « spéciale français » : il a une petite pochette avec une dizaine de clés USB, avec les musiques de différents pays. Nous roulons donc au son de Tryo, Matmatah, Julien Clerc, Johnny, etc. Très éclectique !
Nous nous arrêtons ensuite pour une petite balade sur une sorte de tourbe jusqu’à la Laguna Negra, où nous avons le droit à un en-cas oreo / jus de fruit. Rolando et Victor nous ont accompagné, et Rolando nous donne quelques détails sur le lieu. Des alpagas et lamas, ainsi que quelques ânes, complètent le décors. Rolando nous explique que les ânes, remplacés par les pickups pour le transport, ont maintenant pour principale utilité de servir d’appâts pour les pumas afin de protéger les lamas, plus coûteux à élever…
Vers midi, nous arrivons au canyon del Anaconda, d’après la rivière qui serpente au fond. Nous nous posons ensuite quelques kilomètres plus loin pour le déjeuner, sur l’herbe, au bord d’une rivière, sous le regard des lamas.
C’est un lieu très paisible et nous nous y attardons volontiers pour digérer un copieux repas. L’après-midi sera plus calme : sieste dans la voiture jusqu’à Julaca, un petit village où nous nous arrêtons devant une échoppe qui vend des bières locales au cactus, au quinoa ou à la coca. Nous profitons de la petite terrasse au soleil pour nous désaltérer, avant de repartir pour notre étape finale : l’hôtel de sel où nous dormons ce soir.
Nous y prenons le goûter avant de repartir avec Rolando, un peu contraint, pour une petite excursion sur le salar où nous allons attendre le coucher du soleil. Bien qu’étant au programme vendu par l’agence, nous avons dû insister un peu pour y aller, mais Rolando nous y emmènera finalement.
Nous roulons une quinzaine de minutes avant de nous garer au bord de cette étendue de sel, recouverte d’une fine couche d’eau à cet endroit.
D’un côté, le soleil se reflète sur le salar, de l’autre, nous observons au loin un orage qui éclate. C’est absolument sublime et nous restons bouche bée devant la beauté du spectacle. Irène est très heureuse aussi car lors de son passage il y a presque 4 ans, il n’y avait pas d’eau sur le Salar. Nous avons du mal à détacher nos yeux d’un tel spectacle, le moment fort de ces 4 jours d’exécution.
Nous passons une petite heure sur les lieux et rentrons à l’auberge où nous discutons avec les autres groupes en attendant le repas, lasagnes bolognaises, accompagné de vin et d’un cocktail aux couleurs de la Bolivie. Nous nous couchons tôt car demain, c’est bien avant l’aube qu’il faudra se lever pour profiter du lever de soleil sur le salar.
Jour 4 : le salar d’Uyuni
4h40, le réveil sonne. Nous nous habillons en hâte et chargeons le 4×4 pour un départ à 5h. Nous roulons de nuit sur le salar, sur une piste à peine marquée, Rolando suit son expérience. Jean-Jacques Goldman nous accompagne alors que nous voyons les premières lueurs du jour apparaître sur les montagnes au loin.
Une heure plus tard, nous voilà au pied de l’île Incahuasi, composée de corail mort sur lequel ont poussé des cactus géants, parfois millénaires. Nous grimpons au sommet et trouvons un spot loin de la foule pour apprécier le spectacle de ce lever de soleil. Nous restons traîner sur l’île, à prendre des photos, jouant avec la lumière de l’aube puis redescendons vers la voiture où le petit-déjeuner a été servi. Georgia n’a pas dû dormir car nous avons le droit à deux gâteaux énormes, un nature et un au chocolat.
Petit-déjeuner pris, nous partons pour une balade sur le salar. Nous roulons en ligne droite à 80 km/h et pourtant nous n’avons pas l’impression d’avancer ! Ce désert de sel immense fait vraiment perdre tout repère. Rolando nous explique qu’il utilise les montagnes au loin pour se diriger. Ça fonctionne bien quand il fait beau, comme aujourd’hui, mais sinon, pas de boussole ! Il avoue avoir son GPS de téléphone au cas où : le chauffeur d’un des 4×4 qui vient de nous dépasser se serait perdu plusieurs jours par mauvais temps. Nous nous arrêtons au milieu de nulle part, pour observer les différents cristaux multicouleurs formés sur le salar.
Celui-ci a une superficie totale de 12 000 km2, soit l’équivalent de l’Île-de-France ! L’épaisseur de sel peut atteindre les 120 mètres. Il n’est pas composé d’un grand bloc de sel mais de différentes couches d’eau et de sel en alternance. À l’endroit où nous sommes arrêtés, nous pouvons casser la croûte de sel et observer directement la couche aqueuse sous-jacente. Le sel du salar n’est pas consommable, il paraît même que sa consommation en trop grande quantité rend fou. Nous apprenons enfin que nous nous tenons sur la plus grande réserve de lithium au monde : une fortune pour le gouvernement bolivien qui jusqu’à présent a protégé ce gisement et ce lieu magnifique, mais jusqu’à quand ?
Nous laissons de côté ces considérations pour profiter des lieux et prendre quelques photos, en jouant sur les perspectives. Pas facile !
Nous reprenons ensuite la « route » jusqu’au premier hôtel de sel, aujourd’hui fermé car construit directement sur le salar sans évacuation des eaux usées. On peut toutefois y entrer pour acheter des souvenirs et… aller aux WC…
Nous cassons la croûte une centaine de mètres plus loin. Au menu : poulet rôti, préparé pendant la nuit par Georgia, une vraie cordon bleue, avant de repartir pour les derniers kilomètres sur le salar.
Nous nous arrêtons dans un village en bordure du salar pour une pause « touristes » : un alignement d’échoppes vendant les mêmes sculptures de sel et autres bibelots pour touristes tente de nous attirer alors que le reste du village est pauvre et sale. Nous y restons cinq minutes avant de repartir vers Uyuni.
Dernier arrêt au programme : le cimetière de train d’Uyuni. Nous y restons un petit quart d’heure car nous sentons que Rolando n’a qu’une envie : rentrer à Tupiza pour retrouver sa famille et en particulier son nouveau-né.
Il nous dépose donc devant le « terminal de bus », une rue où s’aligne les guérites des compagnies. Nous y achetons notre billet pour La Paz, en bus de nuit, départ prévu à 20h30.
Nous nous attablons en terrasse à quelques blocs avec Camille et Maël pour boire un dernier verre, nous y sommes vite rejoints par nos compères de la deuxième voiture.
C’est là que nos routes se séparent : Camille, Maël, Aurore et Florian partent pour Potosi tandis que Nath et Catherine reprennent une jeep pour traverser en express le Sud Lipez jusqu’au Chili.
Bilan de l’excursion
Nous sommes très contents de la prestation offerte par Alejandro Tour et en particulier des échanges que nous avons eu avec Rolando, notre guide. Celui-ci a été très professionnel, nous abreuvant d’explications et répondant a toutes nos questions. Il a également géré de manière très professionnelle le « couac » de la deuxième nuit, nous trouvant une solution de rechange (même si, sur le principe, nous n’aurions pas dû devoir payer), et respecté le programme à la lettre, contrairement à d’autres agences (ou chauffeurs) qui vendent la Ciudad del Encanto sans jamais y aller… En ce qui concerne la cuisine, les repas étaient copieux (sauf la première nuit, question d’altitude) et diversifiés. Georgia était debout tard et se levait très tôt pour nous satisfaire. Un petit bémol sur le respect de certaines demandes du groupe : les demandes de plats sans gluten ni lactose, formulées avant le départ ont été difficilement respectées, la cuisinière avait l’air perdu sur certaines compositions… Il semblerait que certaines « grosses » agences ont des menus spécifiques, présentés au moment de la réservation, pour satisfaire à toutes les contraintes.
En tout cas, cette excursion valait carrément la peine et est sans aucun doute l’un des incontournables de la Bolivie. C’est l’occasion d’admirer des paysages très variés aux couleurs multiples, tout en découvrant un peu l’histoire de notre Terre.
Nous n’aurons passé que 8 jours en Bolivie, mais en garderons un souvenir mitigé : d’un côté, les paysages magnifiques du Sud Lipez, du salar d’Uyuni et de la Isla del Sol, de l’autre, la pollution de La Paz, les détritus partout dans les villes comme dans la nature et quelques déconvenues avec les distributeurs de billets.
Nous voilà depuis quelques heures au Pérou, dernière étape de notre périple. Nous décollons dans un mois tout pile de Lima, nous sommes à Puno au bord du lac Titicaca, et d’ici là, rien n’est tracé !
A défaut d’arriver à 7h comme prévu, notre bus, parti la veille à 13h30 de Buenos Aires, arrive en ce vendredi matin à 9h à Puerto Iguazú. Seule anecdote du trajet : un changement de bus au dépôt de la compagnie à 4h30 du matin. Je vous laisse imaginer nos têtes de déterrés, au milieu de bus vides, à regarder les chauffeurs déplacer nos bagages d’un bus à l’autre.
Puerto Iguazú est la ville argentine la plus proche du parc national d’Iguazú, où se trouvent les fameuses chutes d’eau. Notre première mission de la matinée : trouver un billet de bus pour la suite de notre voyage. Le plan est de visiter le parc dans la journée puis de filer vers Salta, à 1000 km à l’ouest.
Comme d’habitude, nous faisons le tour des guérites et nous voilà avec un billet pour le lendemain matin. Nous pensions repartir le soir même, mais les horaires et prix sont moins sympas.
Nous laissons ensuite nos sacs à dos à la gare de bus, puis prenons une navette direction le parc. Celui-ci se situe à 20 km de la ville et est à cheval entre le Brésil et l’Argentine. Nous ne visitons que la partie argentine, qui permet de s’approcher des chutes au plus près tandis que le côté brésilien offre plutôt des points de vue sur l’ensemble des cascades.
L’entrée a des allures de Disneyland, avec ses portiques, ses chemins pavés bordés de boutiques de souvenirs qui mènent jusqu’à un petit train, obligatoire pour accéder aux trois circuits ouverts. En effet, une partie du parc n’est pas accessible à cause des crues, et nous ne pourrons pas visiter l’île San Martín.
Nous commençons donc par le circuit « inférieur » qui nous permet d’observer les chutes d’eau depuis le bas. Le tour fait un peu plus d’un kilomètre, et nous ne sommes pas seuls : touristes et coatis partagent le chemin avec nous. Vous connaissez la première espèce, la deuxième est un animal qui, au contact de l’être humain, est devenu chapardeur et très curieux, au point d’essayer de fouiller dans les sacs à dos si vous avez le malheur de le laisser au sol quelques instants. Nous avons notamment vu un touriste argentin se faire arracher des mains un sac en papier contenant des empeñadas !
Bref, revenons aux chutes. Le tour passe devant une première cascade avant de nous offrir une série de points de vue sur les fameuses chutes, qui s’étendent sur 2,7 km. Nous nous approchons ainsi jusqu’à un mirador situé quasiment sous l’une d’entre elles. Nous affrontons les éléments pour la photo, avec enthousiasme car il fait chaud et un peu de bruine ne nous fait pas de mal.
Nous nous posons ensuite face aux cascades jumelles pour pique-niquer, dans un coin qui s’avère ne pas être fréquenté par les coatis mais par les papillons. Irène en adopte un sur son chapeau, qui restera bien accroché une demi-heure. Nous apprenons plus loin que ces insectes sont attirés par les sels que nous déposons un peu partout, le sol de cette région étant pauvre en minéraux.
En route maintenant vers le circuit supérieur, je vous laisse deviner quels points de vue offre ce circuit ! Nous tombons sur Julie, que nous avions laissée à la gare de bus et continuons donc le chemin ensemble.
Celui-ci, bien aménagé, nous mène successivement au dessus des différentes chutes d’eau du parc. Nous voyons des trombes d’eau se déverser 80 mètres plus bas.
Au terme de cette deuxième boucle, il nous faut reprendre le petit train pour rejoindre le clou de la visite : la Garganta del Diablo (gorge du Diable). En chemin, nous croisons des nuées de papillons et quelques jolis oiseaux. Nous voyons même deux tortues se prélasser au soleil tandis qu’un caïman attend patiemment quelques mètres plus loin. Nous sommes contents d’être sur notre passerelle métallique, deux mètres au dessus.
Enfin, nous atteignons la fameuse gorge du Diable. Le bruit est impressionnant, nous n’entendons plus les hélicoptères qui nous survolent ! Visuellement, c’est tout aussi fou : il y a tellement d’eau que le nuage de vapeur ne nous permet pas de voir le pied des chutes ! Arc-en-ciels et papillons viennent ajouter à la magie du lieu et nous y prenons notre temps pour profiter un maximum.
Nous retournons ensuite jusqu’à l’entrée du parc bercés par le petit train et attrapons une des fréquentes navettes jusqu’au centre. N’ayant pas de logement, c’est notre nouvelle quête de cette fin d’après-midi. Nous trouvons un hôtel pas cher et bien noté en ligne et, après nous être assurés via WhatsApp que nous pouvions utiliser la cuisine, nous voilà logés pour la nuit. C’est donc l’heure de prendre un dernier verre avec Julie, qui reste dans le coin avant de redescendre en Uruguay.
Après avoir dit « au revoir » pour la deuxième fois à Julie (la première c’était à Puerto Natales), nous rejoignons l’hôtel avec nos sacs sur le dos pour un bon repas et une nuit dans un vrai lit afin de nous préparer pour les 26h de bus qui nous mèneront le lendemain jusqu’à Salta.
Un très grand merci à Julie pour toutes les photos de nous présentent dans cet article !
Aujourd’hui, dernière demi-journée en Argentine ! Nous prenons le bus ce matin depuis Tilcara direction la frontière bolivienne. Au passage, nous traverserons la ligne du tropiques du Capricorne (vous comprenez notre titre d’article maintenant !)
En attendant de trouver une connexion décente pour mettre à jour le blog, nous vous donnons rendez-vous en Bolivie !
Je passe rapidement sur la journée du 21 mars, dédiée au repos à Puerto Natales et continue sur le récit de notre périple jusqu’au bout du monde : la ville d’Ushuaïa.
Le trajet
En ce mercredi matin, nous sommes attendus à la gare à 6h45 où un bus doit nous mener jusqu’à Punta Arenas, ville chilienne située à près de 300 km au sud. De là, un bus doit nous mener jusqu’à Ushuaïa. Celui-ci part à 8h30 de Punta Arenas. Les plus rapides auront déjà fait le calcul, 300 km en 1h45, sur une route patagonienne, c’est utopique (et pourtant, ils peuvent rouler vite). En effet, ça l’est : sur les coups de 9h notre bus s’arrête au milieu de nulle part et demande aux passagers à destination d’Ushuaïa de descendre et de récupérer leurs bagages en soute. Nous sommes donc une quinzaine, abandonnés sur le bord de la route, à attendre le bus de Punta Arenas (il y a en fait une jonction à quelques centaines de mètres). Il fait frais mais beau donc ça va. Une demi-heure plus tard, après avoir vu passer plusieurs bus sauf le nôtre, celui-ci arrive enfin et nous reprenons la route direction la Terre de Feu.
Une heure plus tard, nous arrivons à l’embarcadère du bac où bus, camions et autres véhicules attendent patiemment leur tour. Les bus ont visiblement la priorité car nous passons devant tout le monde et traversons le détroit de Magellan en une demi-heure. Nous aurons même la chance d’apercevoir des dauphins noirs et blancs ainsi sue des otaries !
De l’autre côté du détroit, ça y est ! Nous posons le pied sur l’île de Terre de Feu, appelée ainsi lors de sa découverte par Magellan, ayant aperçu la fumée de feux de camp autochtones (un peu comme la Bay of Fires en Tasmanie). Après une trentaine de kilomètres, la route, goudronnée jusqu’à présent, se transforme en route en terre : le gouvernement chilien n’ayant plus de villes au-delà n’a probablement pas jugé nécessaire de faciliter le passage vers l’Argentine. S’en suivent une centaine de kilomètres à 50 km/h jusqu’aux frontières. Comme d’habitude, nous faisons la queue deux fois mais comme nous ne sommes pas le premier bus, cela prend un temps fou et nous ne quittons la frontière Argentine que vers 16h pour retrouver la route goudronnée. C’était notre cinquième et dernier passage de frontière Chili-Argentine (trois dans ce sens, deux dans l’autre) ! Nous arrivons à Ushuaïa à 20h, après une longue journée et décidons de rejoindre notre logement à pied, l’air est doux et nous avons besoin de nous dégourdir les jambes !
Jour 1 : balade dans la ville
Un peu de repos après nos aventures de la veille, nous traînons dans notre logement le matin et, après quelques courses chez Carrefour (si, si !) et un déjeuner maison, nous voilà partis pour découvrir la ville la plus au sud du monde. Bon, en vrai, Puerto Williams, un village situé de l’autre côté du canal de Beagle, au Chili, est encore plus au sud mais il n’a pas le statut de ville selon les critères de l’ONU : le statut de ville est attribué aux bourgades de plus de 20 000 habitants, Puerto Williams compte un peu plus de 2000 âmes contre près de 60 000 pour Ushuaïa. Donc techniquement, Ushuaïa est bien la ville la plus au sud. N’allez pas dire le contraire à un argentin !
Nous marchons vers le port où les agences de voyage se battent pour proposer aux touristes de passage différentes croisières dans le canal pour observer faune et flore. Après avoir discuté avec trois d’entre elles, nous réservons pour le lendemain matin, les conditions étant censée être les meilleures pour naviguer. Nos critères : un petit bateau (10/12 personnes, pas un catamaran à 40 personnes), le prix 1100 pesos (66 €) par personne et les options proposées : une mini randonnée sur un îlot du canal est prévue et le tour inclut la dégustation d’une bière locale au retour. Nous faisons l’impasse sur l’option « balade avec les pingouins », qui dure toute la journée pour ne finalement passer que quelques dizaines de minutes dans un groupe de vingt au milieu des pingouins pour un prix exorbitant.
La sortie réservée, nous décidons d’aller nous cultiver au musée maritime, situé dans l’ancien bagne. Ce musée est en fait un mélange de musée maritime, historique et artistique. Les expositions sont réparties dans les différentes ailes du bagne, et les anciennes cellules hébergent les présentoirs et autres objets d’exposition. Le tout est un peu décousu et nous ne comprenons pas le fil directeur de certaines expositions. Nous en apprenons néanmoins un peu plus sur l’histoire de la ville, créée en 1870 pour étudier les peuples Yagan puis transformée en 1884 en bagne, qu’elle restera jusqu’en 1947. Elle accueillait alors les prisonniers de droit commun et les prisonniers politiques.
Quelques planches nous informent également sur l’histoire des expéditions en Antarctique : 90% des expéditions actuelles font escales ou partent d’Ushuaïa. Nous verrons d’ailleurs dans le port un navire argentin être deux missions.
Nous terminons la journée en nous baladant dans la rue principale, faisons un arrêt dans une brasserie artisanale où nous goûtons la bière locale en écrivant des cartes postales, avant de rejoindre notre logement pour nous faire à manger.
Jour 2 : croisière et randonnée
Aujourd’hui, c’est croisière ! Nous avons rendez-vous à 9h45 pour un départ à 10h, nous partons avec quinze minute de retard car il semble que nous attendions des personnes qui ne viendront pas. Tant mieux ! Nous sommes quatre touristes sur le bateau, avec la guide, le capitaine et un ami de la guide, autant dire que la matinée se passera en petit comité, loin de la foule des catamarans. Vous l’aurez remarqué si vous êtes assidus de ce blog, mais nous n’aimons pas la foule !
Bref, nous voilà partis pour une excursion de 4h dans le canal de Beagle. Considéré comme la seule mer qui touche l’Argentine (le reste de ses côtes est bordé par l’océan Atlantique), le canal sépare la grande île de Terre de Feu de l’île de Navarino au sud, entièrement chilienne. Au milieu du canal se trouve un petit archipel, les îles Bridges, du nom de Thomas Bridges, l’un des premiers colons de la région et, à leur extrémité le phare « Les Eclaireurs » (en français dans le texte), le phare le plus septentrional.
Nous nous dirigeons vers les premières îles pendant que la guide nous fait asseoir en proue du bateau, sous un beau soleil et une mer calme, pour nous décrire la géographie de la région, carte maritime à l’appui. C’est instructif, nous réchauffons notre espagnol un peu délaissé ces dernières semaines au profit de l’anglais. Nous voyons quelques oiseaux de mer et des pingouins de Magellan barboter autour de nous. Et, alors que nous nous approchons des premières îles pour en observer la faune, le capitaine annonce un changement de cap direction le phare au loin car un des bateaux qui nous précède a vu des « bachénas ».
Et là, Irène et moi nous regardons, chacun lisant l’incompréhension dans les yeux de l’autre. Nous demandant à la guide et nos comparses argentines ce qu’il en ressort, celles-ci nous confirment que nous allons voir les bachénas. Certains d’entre vous auront peut-être déjà compris, mais il nous a fallu cinq minutes d’analyse pour choisir si la première lettre était un « v » ou un « b » (prononcés, à nos oreilles non initiées, de la même manière) et si le son « ch » en était bien un ou plutôt le lettre espagnole « ll », prononcée « ch » en Argentine… Ayant un doute quant à la présence d’une espèce de vache au fond de la baie, nous nous décidons pour l’explication la plus plausible et la plus excitante : des baleines ! Et oui, les ballenas, tout simplement !
Et c’est bien de ça dont il s’agit, notre embarcation se dirige droit vers un banc de cétacés dont nous apercevons déjà les jets d’eau percer la surface au loin. Sur les lieux, nous avons l’énorme chance de voir ces animaux sortir de l’eau pour prendre de l’air. Il y en a plus d’une douzaine, chaque bateau s’approche prudemment, évitant d’encercler les baleines mais plutôt en voguant à leur côté. Celles-ci ne semblent pas gênées, elles sortent régulièrement à quelques mètres de nous, parfois en groupe de deux ou trois bêtes, pour notre plus grand plaisir. Notre guide, Laura, toute aussi excitée que nous, nous explique que c’est la période des migrations vers le nord. Les baleines rejoignent les côtes de l’équateur pour l’hiver austral après avoir profité des immenses réserves de poissons de l’Antarctique. Ce groupe particulier a dû décider de prendre un raccourci par le canal de Beagle, ce qui n’est pas fréquent. Même le capitaine est aux anges, montrant à quel point nous sommes chanceux.
Nous laissons les baleines continuer leur périple et reprenons le cours de l’excursion. Notre traque nous ayant mené jusqu’au phare, nous en faisant le tour pour une petite séance photo avant de nous diriger vers les îles les plus proches où nichent différentes espèces d’oiseau.
Un peu plus loin, nous approchons une autre île où paressent lions de mer et phoques (tout du moins, d’après nos traductions).
Enfin, nous rejoignons l’île Thomas, île principale des îles Bridges, où nous débarquons pour une petite balade d’une demi-heure. Laura nous montre quelques coquillages, expliquant le rôle de chacun, nous observons des algues de près pour comprendre comment celles-ci s’ancrent au fond de l’eau tout en flottant à la surface. Passée cette séance de (re-)découverte des bords de mer, nous grimpons quelques rochers jusqu’à la lande dont la flore présente la particularité de pousser en milieu alpin ! Nous sommes pourtant à dix mètres au dessus du niveau de la mer ! Parmi cette végétation, nous découvrons une mousse très compacte qui croît de quelques millimètres par an seulement. Certains spécimens doivent être là depuis plusieurs centaines d’années.
Nous terminons cette balade sur un promontoire nous offrant un point de vue sur la ville d’Ushuaïa et son aéroport d’un côté, sur l’île de Navarino de l’autre. Nous ne sommes toutefois pas assez hauts pour voir le Cap Horn, situé à une centaine de kilomètres.
De retour au bateau, c’est l’heure de la détente : nous nous posons au soleil, en proue du navire, pour siroter un demi de Beagle, la bière locale.
Nous avons même la chance de retrouver quelques baleines qui se sont approchées du port et nous en profitons une dernière fois, seuls sur l’eau, les autres bateaux étant déjà rentrés au port.
Nous débarquons les yeux amplis de belles images mais la journée n’est pas terminée. Nous voulons profiter du beau temps pour aller nous balader jusqu’au lac Esmeralda. Le point de départ de la randonnée est situé a 20 km du centre et notre hôte nous a indiqué que l’autostop fonctionnait très bien. Nous suivons ses conseils et effectivement, deux minutes après notre arrivée sur la route principale, une dame nous embarque et nous dépose à l’entrée de la ville à 7 km. Nous tentons le coup à nouveau et à peine une minute après avoir levé le pouce, c’est une famille qui nous prend en charge et nous dépose au point de départ de la rando. Voilà une affaire rondement menée : moins d’une heure après avoir mis pied à terre, nous sommes en route vers le lac.
Le chemin traverse bois et vallée, aux couleurs déjà automnales. Ce dégradé de couleurs chaudes, du rouge profond à l’or éclatant est absolument superbe. Nous en savourons les reflets moirés pendant toute la balade. Nous traversons plusieurs rivières sur lesquelles des castors ont construit des barrages, puis ça se corse : nous abordons un champ de boue, une vraie pataugeoire que nous tentons tant bien que mal de traverser sans trop salir nos chaussures. Deux heures de grimpette plus tard, nous voilà arriver au lac. Après une petite pause, nous repartons dans l’autre sens et rejoignons le parking en une heure. Dans ce sens, nous avons moins de succès avec le stop. Mais relativisons, nous attendons au final un quart d’heure avant d’être raccompagnés par Gustavo, avec qui nous discutons voyage.
Après cette journée épuisante, mais riche en émotions et haute en couleurs, nous sommes contents de retrouver un vrai lit et un toit qui nous protège des averses de la nuit.
Jour 3 : dernier tour de piste avant l’envol
Nous profitons du fait que personne n’a loué notre chambre Airbnb pour traîner et finir nos sacs. Nous décollons en fin d’après-midi pour Buenos Aires et n’avons donc rien de prévu pour la journée.
Pour profiter néanmoins du grand soleil, nous emballons nos restes et allons pique-niquer sur la jetée, face à la baie d’Ushuaïa, conscients que c’est probablement la dernière fois que nous profitons de ce paysage. Un dernier tour en ville pour boire un chocolat chaud et nous rentrons récupérer nos sacs pour nous rendre à pied jusqu’à l’aéroport. Celui-ci se situe à 5 km du centre et une promenade piétonne permet d’y accéder sans risque. Inutile de préciser que nous sommes les seuls avec des sacs à dos parmi les joggers et les badauds promenant leur chien. Mais la promenade est agréable, avec vue sur le canal et les montagnes chiliennes derrière. À l’aéroport, après avoir enregistré nos bagages, nous restons nous prélasser au soleil jusqu’au moment de l’embarquement, et nous voila partis pour un saut de puce de 3000 kilomètres.